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from Laërte

Nos vies sont imparfaites, et sujettes d’un monde que nous ne contrôlons que peu. Nous sommes tous confrontés à des éléments qui nous dérangent ou nous heurtent, et nous développons tous des goûts, affinités plus ou moins prononcées envers tel ou tel aspect de nos environnements.

Voiture à 8 cylindres

La fiction nous permet parfois d’apprécier ce qui est autrement insupportable : meurtres, guerres, scènes horrifiques, etc. Et parmi les œuvres de fiction, le jeu possède une place particulière : nous pouvons y être acteurs de ce que nous détestons. Incarner un soldat, un dictateur, ou je ne sais quoi d’autre encore. Comme le dit un ami : « le capitalisme, c’est très bien dans les jeux vidéo ».

Les voitures c’est dégueulasse, c’est sale et ça pue, mais je les aime en tant qu’objet vidéo-ludique autant que je les exècre au quotidien. Si vous voulez bien attacher vos ceintures, je vous propose un voyage vers ma dernière découverte sur le sujet.

Une longue route

Si je remonte le fil de ma vie de joueur, les jeux de course de voiture semblent ponctuer le temps de façon régulière, sans pour autant qu’ils soient au centre de mes intérêts. Lorsque l’on me demande mes jeux favoris, ou mes meilleurs souvenirs vidéo ludiques, ce n’est généralement pas ce genre qui ressort en premier.

Ce parcours que je vais brièvement décrire n’a presque de sens que dans le cadre de ce billet, et n’est qu’une description parcellaire d’une facette elle-même mineure de mes goûts. En aucun cas je ne suis un spécialiste du sujet.

Point de départ

Dans les recoins les plus anciens de ma mémoire, la course automobile sur ordinateur est déjà présente. Il m’arrive encore par nostalgie de relancer mes premiers jeux de ce type, Lotus : The Ultimate Challenge, ou encore MegaRace1.

Longtemps, Stunts m’a fasciné, et durant plusieurs années, j’ai été incapable de passer plusieurs mois sans y rejouer. Le contraste entre l’aspect arcade (on pouvait y trouver loopings et tremplins) et son exigence stricte (le moindre crash ou presque était fatal), cumulé avec un éditeur de niveau particulièrement intuitif m’a laissé des souvenirs vivaces. Je ne suis pas surpris que ce jeu de 1990 possède toujours un public et une communauté passionnée.

Il y a eu ensuite la découverte de la vraie simulation avec Formula One Grand Prix de l’impressionant Geoff Crammond2, grâce au 4ᵉ numéro du magazine Bestseller Games. Passé la frustration de ne pas réussir à finir un seul tour de circuit sans aide au pilotage, c’est avec lui que j’ai fait l’apprentissage lent et empirique de la façon dont on est censé aborder un virage, et que j’ai commencé de comprendre approximativement les bases du réglage d’une voiture de course.

CD de Megarace et Formula One Grand Prix

Il y eut aussi quelques jeux que la mémoire collective semble avoir oubliés, comme l’excellent POD, magnifique lorsque joué avec une carte 3dfx, ou le simple mais amusant Ultim@te Race Pro et son nom ridicule.

Faire une liste exhaustive n’aurait pas de sens, mais tant que j’en suis à étaler mes souvenirs, je me dois de citer les Midtown Madness et leurs environnements incroyables. Ces jeux permettaient de déambuler librement dans des villes modélisées de manière impressionnante pour l’époque, même si réduites en taille : Chicago pour le premier, puis Londres et San Francisco dans le second. Détail d’un autre temps : l’on pouvait insérer un CD audio dans le lecteur de l’ordinateur, et l’écouter en jeu via les commandes de l’autoradio de la voiture conduite.

Plus récemment, j’ai passé quelque temps sur des jeux comme Grid Autosport, Need For Speed Shift, ou les derniers Forza Horizon.

Forza Horizon 4

Dans le monde de la vraie simulation, jusqu’à il y a peu, ma dernière escapade s’était faite sur Grand Prix Legends, une référence du domaine, mais un jeu du siècle dernier.

La simulation

Le terme de simulation n’implique normalement pas de réalisme, mais du crédible : on peut simuler l’imaginaire. Piloter un vaisseau spatial dans un jeu comme Elite : Dangerous ou bien un bolide dans Star Wars : Racer Arcade ne reproduit pas une expérience réelle. Pour autant, ces deux jeux cherchent bel et bien à simuler ce que serait de piloter ces véhicules dans leurs univers respectifs.

Vous noterez mon usage du terme « vraie simulation » dans les paragraphes précédents. C’est ce qu’on appelle généralement le sim racing, plus restreint que de la simulation au sens large (fausse, pour les puristes). Il s’agit de jeux qui cherchent avant tout à reproduire en détail la course automobile réelle, et de cette volonté découle bien souvent une difficulté très marquée.

Publicité pour Formula One Grand Prix

Ces simulations sont généralement considérées comme distinctes des autres jeux de course, même si cette séparation, bien qu’utile, est trop catégorique : la course automobile est représentée dans des jeux qui mélangent allègrement toutes les caractéristiques souhaitées par les développeurs, des plus simplistes aux plus complexes, du gameplay le plus arcade à celui le plus exigeant. On trouve d’ailleurs des termes comme celui de simcade désignant spécifiquement ce qui se déroule à la frontière entre l’arcade et la simulation puriste.

Un jeu comme Power F1 de 1996 est un excellent exemple de ce qu’on peut à posteriori qualifier de simcade. Y jouer sur DOSBox Staging en utilisant une manette moderne est une expérience étrange mais plaisante.

Réalisme et immersion

Avec le temps, je suis devenu un fier imposteur. Il m’arrive parfois de jouer à des jeux tenant du sim racing, mais jamais avec un volant. J’utilisais un joystick avant la démocratisation des manettes avec sticks analogiques. Je n’hésite pas à utiliser les boîtes de vitesse automatique. Je ne cherche pas forcément la difficulté maximale.

Dessin de voiture plongée dans une rivière

Si je joue à ces jeux, c’est maintenant non pour la recherche d’un réalisme que je ne saurais d’ailleurs juger, mais pour une forme toute personnelle d’immersion : comme je le disais en introduction de ce billet, je déteste la voiture. Je ne conduis pas et je n’ai jamais passé le permis.

En contrepartie, il existe chez moi un imaginaire romantique du monde automobile et du sport automobile. Il s’est forgé dans le temps, mélangeant souvenirs d’enfance de séries telles qu’Amicalement Vôtre ou Chapeau melon et bottes de cuir et vision déformée de la conduite, formatée par la pratique vidéo ludique (peu onéreuse, contrôlée avec une manette, permettant vitesse sans danger, etc.).

Extrait de Chapeau melon et bottes de cuirExtrait de Chapeau melon et bottes de cuir

Les véhicules font voyager, et ainsi nous dévoilent des mondes sous des angles inaccessibles autrement. Profiter des panoramas spatiaux fait partie du charme d'Elite : Dangerous, les simulateurs de vol comme Flight Simulator ou même Flight Unlimited (magnifique pour l’époque) intègrent volontairement cette dimension paysagère. Dans cette même veine, voir défiler la campagne dans des jeux de voiture est toujours un plaisir pour moi.

Forza horizon 4

J’aime conduire dans les jeux. De nuit, de jour, en plein soleil ou sous la pluie, pour déambuler paisiblement ou chercher la courbe et le temps parfait, seul ou plongé dans la cacophonie des moteurs de dizaines d’autres bolides conduits par des adversaires impitoyables. Une sorte de transe peut se nicher dans ces longues sessions, et une forme de tranquillité s’en dégage aisément.

La recherche du Graal

Sans jamais l’avoir formalisé, je possède une sorte de cahier des charges de mon idéal de sim racing. Afin de vous en donner une idée, voici quelques-uns des éléments qui me sont importants :

  • Un moteur physique rigoureux et immersif
  • Une maniabilité sans faille à la manette
  • Un large catalogue de circuits de tous types
  • De la météo, et une gestion du cycle jour nuit
  • Des courses longues (jusqu’à 24h)
  • Des adversaires compétitifs et crédibles
  • Des sauvegardes en cours de course
  • Un moteur sonore le meilleur possible
  • Sans abonnement ni micro-transactions
  • Jouable hors-ligne

Et par-dessus cette liste incomplète, ajoutez une nette préférence pour les voitures des années 60 à 70 pour les raisons évoquées plus haut. Je serais malhonnête de ne pas l’avouer, cette affinité est fortement renforcée par un manque de compétences : maîtriser la vitesse extrême de bolides plus modernes n’est pas vraiment à ma portée.

Les amateurs à la rescousse

Mes critères paraissent bien trop spécifiques pour qu’un tel jeu puisse exister. Mais tout arrive, et des convergences parfois se créent qui donnent naissance à l’improbable. Et c’est le cas ici.

Une base : GTR 2

En 2002, une bande de passionnés offre au monde une chose nommée GT Racing 2002. Il s’agit d’un mod du jeu F1 2000. Les titres l’indiquent : il s’est agi de transformer une simulation de Formule 1 en simulation de Grand Tourisme. Le web francophone garde en mémoire l’enthousiasme du public de l’époque pour ce travail.

Il semblerait que la production ait été d’excellente qualité pour un mod amateur. Et l’équipe ne s’est pas arrêtée là : elle s’est professionnalisée et a donné naissance à toute une plâtrée de jeu, dont les célèbres Project Cars, RaceRoom, et peut-être un futur GTRevival.

Mais je saute des étapes. Début 2005 sort GTR – FIA GT Racing Game, suite à 18 mois de développement. Ce développement court est une illusion. Comme l’explique Eric Boosman, les fondations du jeu se situent dans le travail fourni pour le mod gratuit pour F1 2000, et il y a en réalité eu un paquet d’années de labeur fournies bénévolement pour que le jeu puisse sortir.

What GTR is did not come from an 18 month dev cycle, but in fact, several years of passionate dedicated mod work, continuously improved upon and further developed. We didn't have any schedules, we had no idea of the danger of feature creep, and our overhead costs were $0. I personally put in about 35 hours per week in mod work on top of my full time job (I worked 4x10 hour days doing tech support at an ISP) for years before we got the opportunity to be paid for game dev.

Eric Boosman – forum d'overtake.gg

Et l’année suivante, sa suite, GTR 2 – FIA GT Racing Game est parue, capitalisant sur le moteur du jeu précédent. GTR comme GTR 2 se focalisent sur le Grand Tourisme d’endurance, simulant les voitures et circuits du début des années 2000.

GTR 2 est un excellent jeu, quoiqu’un peu oublié. Même à sa sortie, il est passé relativement inaperçu en dehors du monde de la simulation : cela lui a valu l’honneur d’avoir le prix Gamespot du meilleur jeu de 2006 auquel personne n’a joué en plus du prix du meilleur jeu de course automobile.

Want pure racing-game bliss? Here's a great formula: One souped-up gaming rig, your racing wheel and pedal setup of choice, and one copy of GTR 2, the amazing follow-up to SimBin's excellent 2005 effort, GTR. Even without all that, though, GTR 2 is an amazing experience, one that not only challenges you as a player through its demanding artificial intelligence and uncompromising physics, but also manages to be a heck of a lot of fun, even for racing fans who might otherwise be turning left at Talladega or sending their ride off the side of a cliff.

Gamespot

Ce jeu possède beaucoup de caractéristiques communes avec mon idéal rêvé : cycle complet jour/nuit, moteur physique immersif, des adversaires compétitifs mais justes, des courses longues avec possibilité de stratégie, etc. GTR 2 tient toujours la route, alors même qu’il a l’âge aujourd’hui d’avoir son permis. De nombreuses personnes défendent encore ce jeu comme étant une des meilleures simulations actuelles3, et du contenu additionnel (voitures et circuits) continue d’être créé par ses joueurs4.

Power & Glory

Le rythme de sortie paraît fou, mais la réalité est encore plus impressionnante : entre ces deux sorties est paru GT Legends. Utilisant le même moteur, ce jeu reproduit les courses historiques de 2005 de la FIA durant lesquelles des voitures des années 60 et 70 étaient équipées de pneus modernes et autres améliorations.

Un miracle nommé Power & Glory se produit alors : de 2007 à 2016, une autre bande de bénévoles acharnés, le GT Legends Workshop, va d’abord commencer par intégrer les voitures de GT Legends dans GTR2, puis les transformer, les modifier, retravailler le moteur physique du jeu, l’IA des adversaires, refaire entièrement les menus du jeu, enregistrer une bande son, et j’en passe etc. L’objectif ? Reproduire la conduite de ces voitures anciennes au plus proche de ce qu’elle fut historiquement dans les années 60 à 70.

The aim of the GT Legends Workshop is to try to fill that gap, even if only partially – to produce the cars as close as we can to the way they were in the 60 s and 70 s. While in the longer term it would be great to focus on specific championships, we are currently somewhat limited by the lack of tracks from the period. Also while the range of cars included in GT Legends is impressive, there are cars required for specific championships which are not currently available.

Site officiel du GTLW

Ce fut un travail titanesque, et le résultat est d’une qualité incroyable. Lorsqu’on regarde de plus près quelques-uns des noms de l’équipe, le niveau de peaufinage de la chose s’explique.

Le travail sur la physique du mod a été fourni par un duo de choc : Aristotelis Vasilakos et Niels Heusinkveld. Le premier a depuis été le responsable du moteur physique chez Kunos, pour le célèbre Asseto Corsa. Le second a travaillé au sein de Reiza sur une autre licence phare, Automobilista.

Concernant les sons, c’est un certain DucFreak qui s’en est chargé. À noter qu’il avait auparavant travaillé pour Blimey, boîte en bonne partie responsable du développement de GTR2. Et le résultat est impressionnant. Meilleur même à mon sens que celui du jeu d’origine.

Today you can easily find around high-quality audio onboard recordings (on Youtube, Vimeo, and you can even buy them now from third parties). Not so back then. Getting any recordings at all from the real counterparts (to produce the samples used in P&G) was like finding a needle in a haystack. But even harder was getting one that could be used! 😕 Each car soundpack ended up being built after dozens (upon dozens) of recordings, hundreds of experiments and after many (countless) rejected soundpacks. How those ”questionable quality” recordings became into what you have in the final product (in-game) is, quite frankly, down to black-magic arts (or close to that) and, honestly, I'm not so sure I'd go through all the trouble again if the clock went back (certainly not for free) ! ☕

Ducfreak – Forum d'overtake.gg

Pour faire simple, Power & Glory est un excellent jeu de simulation de course des années 60 à 70. La seule chose qu’on pourrait lui reprocher serait l’absence de circuits d’époque. En plus d’être injuste avec l’équipe dévouée qui a concocté ce mod, c’est aussi ignorer volontairement la qualité des circuits proposés de base dans GTR 2, qui est tout à fait convaincante même s’ils sont de facto anachroniques dans cette version révisée du jeu.

De toute manière, je ne suis pas spécialiste du sport automobile, et je me verrais bien en peine si je devais par exemple citer de réelles différences entre le circuit d’Anderstorp des années 70 et la version présente dans le jeu.

Aller plus loin encore

Une fois qu’on est en là, on doit continuer. Creuser, chercher, et trouver comment augmenter la chose. Et comme je le disais, les circuits sont le point faible de Power & Glory. Et c'est ici qu'entrent dans la danse d’autres bandes de magnifiques acharnés, qui ont offert au monde des merveilles inattendues.

Un exemple ? La légendaire Targa Florio. Vous trouverez la version GTR 2 par ici. Cette course historique, emblème d’une époque passée est également légendaire en tant que course simulée. Sa reproduction est impressionnante autant qu’improbable. Je vous enjoins à visionner cette vidéo, qui retrace cette histoire formidable :

Une autre équipe, Virtua_lm semble avoir travaillé sur un gros projet de mod pour F1 Career Challenge. Concernant GTR 2, leur travail a donné naissance à quelques circuits aux finitions hors du commun5 : un superbe Sebring, le circuit de Rouen Les Essarts qui est devenu une de mes courses favorites, un Mid-Ohio sans aucun défaut, une très belle Fuji_Speedway, et surtout plusieurs versions historiques du Mans. Ces courses ne sont pas toutes d’époque, mais elles possèdent chacune un caractère unique.

Je me dois aussi de citer La ronde Cévenole, fruit de 5 ans d’efforts de la part d’une seule et unique personne. Des dizaines de kilomètres de route tortueuse en montagne. Ce circuit n’est pas celui avec les graphismes les plus fins, mais l’immersion est présente, et le parcourir est un vrai plaisir.

Enfin, un site allemand, Festbierbude répertorie un énorme paquet de circuits d’époque, de qualités diverses, mais tous ceux que j’ai essayé sont au moins jouables. Ce site rassemble aussi une petite communauté de joueurs qui se retrouvent pour des courses en ligne.

Un assemblage sur mesure

C’est ainsi que j’ai assemblé ma simulation idéale. Je ne cherche pas la reproduction historique exacte, mais simplement des courses qui me plaisent, et j’y suis arrivé. Les étapes de configuration pour obtenir ce beau mélange sont peu complexes mais assez nombreuses, et il me faudra à l’avenir écrire un court guide, si certains souhaitent profiter de la même chose.

En attendant, les éléments principaux sont GTR 2 qu’on trouve pour moins de 10 €, le superbe Power & Glory 3.2, et le GTR2 16th Anniversary PATCH avec son hotfix. Si comme moi, vous utilisez une manette et non un volant, le DirectInput Force Feedback Driver for XInput est fort utile pour traduire les signaux de Force Feedback en rumble.

La course en immersion

Je suis actuellement au milieu d’une course de 24h sur le circuit de Sebring. Il est 4h du matin, je vais bientôt laisser la place au second pilote, mais je dois tenir encore un peu.

La vigilance est permanente : le circuit est parsemé de voitures plus lentes, des Abarth 1000TC, ou des Lotus 7 dont les pilotes doivent presque plus souvent scruter leurs rétroviseurs que la route devant eux. Des monstres me doublent en hurlant de toute la puissance de leurs moteurs, Ford GT40 ou Porshe 906, voitures massives bien plus lourdes que mon agile Lotus Elite.

Chaque virage est technique, et les reliefs de la route me maintiennent concentré. Je garde pour le moment une conduite mesurée, et j’évite les prises de risque dans cet état de fatigue ; sur ce type de course, arriver au bout est déjà une réussite.

Un extrait :

#JeuVidéo #Modding

Source des illustrations :


1 Pour profiter de ces deux jeux de la meilleure façon possible, comme pour la plupart des jeux MS-DOS, votre meilleure arme est DOSBox Staging. Il existe des petits réglages permettant d’améliorer l’expérience (notamment ajouter une légère reverb et un peu de chorus sur l’émulation des cartes son OPL2 et OPL3), mais les réglages par défauts sont déjà excellents. Concernant ces deux jeux, MegaRace est un incontournable ne serait-ce que grâce à l’extraordinaire bande-son signée par Stéphane Picq, et l’éditeur de circuit de Lotus : The Ultimate Challenge est particulièrement notable par son élégance et sa simplicité.

2 Geoff Crammond est aussi le créateur de The Sentinel, un excellent jeu de 1986 que je vous invite très fortement à essayer.

3 Je serais bien mal placé pour affirmer que GTR 2 peut réellement se mesurer aux jeux de sim racing modernes. Néanmoins, pas mal de gens avancent des arguments que j’entends assez bien :

4 Je me dois de donner quelques exemples démontrant la vivacité de la communauté qu’agrège ce jeu. Plusieurs nouveaux circuits et voitures inédites ont été rendus disponibles ce mois-ci sur le site d'overtake.gg. Le célèbre logiciel Crew Chief possède aussi des fonctions spéciales pour GTR 2, améliorant le jeu sur pas mal d’aspects. Une mise à jour de cet outil a été publiée il y a moins de deux semaines. Et enfin, pour le 16ᵉ anniversaire du jeu, un patch de contenu et d’amélioration démesuré a été créé par des passionnés. Ce patch a eu le droit à une mise à jour corrective il y a 2 ans.

5 La version par Virtua_lm du circuit de Sebring est restée pendant longtemps la meilleure modélisation. Elle n’a été surpassée que par la version pour rFactor 2, créée grâce à des scans laser du circuit réel. Leurs versions du Mans possèdent quelques soucis lorsqu’on les parcourt de nuit, facilement réglés avec une simple manipulation. Mid-Ohio et Rouen sont parfaits. Fuji est le circuit avec le plus gros problème : en fin de journée et de nuit, les textures de background et de skybox ont des comportements étranges. Cela n’empêche pas de superbes courses en journée, tant qu’on ne dépasse pas la fin d’après-midi en jeu. C’est un problème mineur : la majorité des circuits créés par des amateurs n’est de toute façon pas prévue pour être jouée de nuit.

 
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from dece

Mon association utilise Sage 100 pour sa comptabilité et sa gestion commerciale. On avait le projet de permettre d'adhérer par HelloAsso tout en gardant Sage comme le registre officiel, donc avec un moyen pour nous de mettre à jour des données d'adhérents sur Sage suite à une adhésion sur HelloAsso. Mais voilà, il n'y a pas d'API Sage qui permettrait de faire ça, à part quelques services propriétaires et payants. La seule méthode officielle pour interagir avec Sage est de créer des applications Windows utilisant la bibliothèque « objets métiers », c'est à dire une DLL avec des entrées COM dessus, bien années 2000, attendez je vais chercher ma Beyblade !

La solution que j'ai trouvé c'est de développer deux API : Passage, une API en C# collée à Sage utilisant les objets métiers dont je vais parler ici, et un module de notre intranet maison pour faire le lien entre HelloAsso et Passage sur lequel je passerai brièvement.

Le but de cet article hautement spécifique est de faire gagner du temps à des structures comme la mienne qui se retrouvent un peu perdues face à la boîte noire qu'est Sage lorsqu'il faut interagir avec ses données, en présentant le cheminement que j'ai suivi pour atteindre mes objectifs.

À noter : je me concentre sur mon cas d'usage qui est une interaction avec un Sage 100 on-premise, c'est à dire installé sur un serveur à nous, je ne sais pas du tout comment fonctionne les versions cloud de Sage. Il s'agit aussi de la version française de Sage 100 qui est assez différente de la version internationale, donc traduire ses recherches pour avoir des résultats internationaux n'est pas forcément judicieux.

Sur l'absence de documentation sur le Web

Sage ne diffuse que peu de documentation sur le Web sur comment développer une application utilisant ses objets métiers, parce qu'ils vendent des formations à 720€ les 3 demi-journées, ce qui est un peu trop prohibitif à mon goût vu ce qu'on paye déjà en licences logicielles. Il va donc falloir sortir ses meilleures requêtes sur votre moteur de recherche de prédilection pour trouver les obscurs messages de forum datant d'il y a 15 ans qui vous permettront de surmonter tel ou tel obstacle. Si vous avez un prestataire qui gère votre installation Sage, c'est possible de lui demander quelques conseils mais il risque de vous diriger rapidement vers le site de formation ou de vouloir vous facturer une intervention.

J'ai quand même trouvé pas mal d'infos dans deux documents que je vous link ci-dessous (attention c'est pour Sage v9). Le premier est la doc' des objets métiers qui présente les principes d'utilisation avec quelques exemples de cas d'usage, pour la plupart en Visual Basic, parfois en C#. C'est très superficiel mais il y a quand même pas mal d'infos bonnes à prendre. J'ai appris l'existence du second par des messages cryptiques de forum expliquant qu'il fallait se référer au « strucfic » pour comprendre l'organisation de la base de données. Le quoi ?! Arrêtez d'inventer des mots, il y a déjà assez d'information à intégrer. En fait c'est le petit nom du document « Structure des fichiers », qui décrit en détail l'organisation de la base de données SQL utilisée par Sage et sur laquelle on reviendra plus tard.

Je vous conseille de survoler au moins le premier document, et de garder le deuxième sous le coude pour plus tard.

Créer un projet C# avec les objets métiers Sage

Le langage le plus représenté dans les exemples qu'on peut trouver en ligne c'est du Visual Basic, mais je n'avais vraiment pas envie d'introduire ce langage dans notre stack. Mon association utilise du PHP partout mais il n'y a aucune documentation officielle ou pas sur l'utilisation des objets métiers via l'extension COM de PHP donc je me suis orienté vers la moins pire des alternatives, C#, pour développer Passage.

C'est important de noter que je n'y connaissais presque rien en C# mais ça ne m'a trop gêné, les tutoriels sur le MSDN étant corrects, si on les consulte en anglais car les traductions françaises sont automatisées et régulièrement catastrophiques.

Préparation

Le système de licence Sage étant ce qu'il est, le plus simple est probablement de travailler directement sur le serveur où est installé Sage, mais organisez-vous comme ça vous semble le mieux.

Préparez votre environnement de développement C# avec Visual Studio, installez les objets métiers (installeur ci-dessous), créez une base de données de test sur SQL Server—votre prestataire Sage doit pouvoir vous aider ici, moi j'ai dupliqué notre base de production pour pouvoir tester des trucs sur des données réalistes sans toucher aux données de production.

Téléchargez l'installeur objets métiers par ici.

Le projet de base

Je vais être très synthétique ici, j'ai suivi les tutoriels pour créer une API Web avec ASP.NET Core. Je ne comprends rien au mille dénominations de technos Web chez Microsoft, mais ça avait l'air d'être le truc moderne fin 2023 sur lequel aller. Je vous laisse explorer le MSDN pour la création de projet et les principes du framework.

Créer une API Web avec ASP.NET Core

À un moment vous allez devoir ajouter les objets métiers Sage comme dépendances à votre projet. Je ne me rappelle plus comment j'ai fait dans le mille-feuilles de menus et d'options sur Visual Studio, il faut ajouter une « référence COM » quelque part et vous trouvez les objets métiers Sage dans une immense liste… Là aussi, les moteurs de recherches sont vos meilleurs alliés. Je sais juste qu'à force d'essayer je me suis retrouvé avec cette section dans mon fichier de projet Passage.csproj :

  <ItemGroup>
    <COMReference Include="Objets100cLib">
      <WrapperTool>tlbimp</WrapperTool>
      <VersionMinor>2</VersionMinor>
      <VersionMajor>9</VersionMajor>
      <Guid>8b42efd1-11de-4af5-8f95-2901702d7a46</Guid>
      <Lcid>0</Lcid>
      <Isolated>false</Isolated>
      <EmbedInteropTypes>true</EmbedInteropTypes>
    </COMReference>
  </ItemGroup>

Vous êtes prêt lorsque vous avez une petite API qui tourne avec, disons, un ApiController de test que vous pouvez interroger, si possible le Swagger d'activé pour tester vos endpoints et que vous pouvez importer les objets métiers Sage dans votre code :

using Objets100cLib;

Lire des infos contenues dans Sage via SQL

J'en ai pas parlé jusqu'ici mais c'est importer de savoir qu'on peut lire l'intégralité du contenu stocké dans Sage sans toucher à Sage ni aux objets métiers mais simplement en lisant la base de données SQL Server ! Les données sont réparties sur beaucoup de tables que le PDF structure des fichiers documente copieusement. Par exemple la table F_DOCENTETE contient tous les entêtes de document dont les factures, F_DOCLIGNE contient chaque ligne de facture, F_ARTICLE les articles, F_COMPTET les comptes tiers et leurs champs d'informations libres, etc.

Dans la pratique, j'ai trouvé que c'était souvent plus simple de faire une bonne grosse requête SQL directement sur la base plutôt que de s'embêter avec l'API des objets métiers pour créer des collections et galérer à filtrer les résultats.

Exemple de requête pour trouver les numéros de compte tiers avec une adresse e-mail donnée :

SELECT CT_Num
FROM F_COMPTET
WHERE CT_EMail = 'client@example.com'

Ou encore vérifier qu'une référence de facture existe :

SELECT DO_Ref
FROM F_DOCLIGNE
WHERE DO_Ref = 'REF549832'

Se connecter à Sage avec les objets métiers

Mais alors attends, pourquoi se prendre la tête avec des objets métiers si on peut taper directement dans la base de données ? Parce qu'il y a beaucoup de triggers et de colonnes obscures qui sont compliquées à mettre à jour à la main et vous risquez de corrompre votre Sage si vous les modifiez vous-même. Autant pour la lecture il n'y a pas de problème, autant je ne me risquerai pas à exécuter le moindre INSERT ou UPDATE sur les tables de Sage.

Avant de passer à la phase modification, on va donc regarder comment utiliser les objets métiers pour se connecter à Sage.

Ouvrir et fermer une connexion

Selon l'offre de Sage qu'on a, on peut avoir plusieurs module auxquels se connecter. Ici on a la comptabilité et la gestion commerciale, et ça fait deux modules auxquels on peut se connecter via deux objets différents dans l'API des objets métiers. La base compta est gérée via l'objet BSCPTAApplication100c et la base gestion commerciale (que je vais abréger en gescom) est gérée via l'objet BSCIALApplication100c. On ouvre et referme la connexion à ces deux objets avec une même interface, mais les deux objets permettent ensuite d'accéder à différentes parties de Sage. Par exemple on manipule les comptes tiers avec la base compta mais on manipule les documents de vente avec la base gescom.

Le code suivant permet d'ouvrir une connexion à chacune des deux bases puis de les refermer :

using Objets100cLib;

namespace Passage
{
    internal class Sage
    {
        public static readonly string Server = @"MON-SERVEUR\SAGE100";
        public static readonly string Database = "MA-BASE-DE-TEST";
        public static readonly string User = "MON-USER";
        public static readonly string Password = "MON-MDP";

        public static void DemoConnexion()
        {
            // Ouverture de la base Comptabilité.
            var cpta = new BSCPTAApplication100c();
            cpta.CompanyServer = Server;
            cpta.CompanyDatabaseName = Database;
            cpta.Loggable.UserName = User;
            cpta.Loggable.UserPwd = Password;
            cpta.Open();
            if (cpta.IsOpen)
            {
                Console.WriteLine("Connecté à la base compta.");
                // Ici on peut interagir avec la base compta, par exemple :
                //   cpta.FactoryClient.ReadNumero(...)
                // Et on la referme après utilisation.
                cpta.Close();
            }
            else
            {
                Console.WriteLine("Échec de l'ouverture de la base compta.");
            }

            // Ouverture de la base Gestion Commerciale.
            var cial = new BSCIALApplication100c();
            cial.CompanyServer = Server;
            cial.CompanyDatabaseName = Database;
            cial.Loggable.UserName = User;
            cial.Loggable.UserPwd = Password;
            cial.Open();
            if (cial.IsOpen)
            {
                Console.WriteLine("Connecté à la base gescom.");
                // Ici on peut interagir avec la base commerciale, par exemple :
                //   cial.CreateProcess_Document(DocumentType.DocumentTypeVenteCommande)
                // Et on la referme après utilisation.
                cial.Close();
            }
            else
            {
                Console.WriteLine("Échec de l'ouverture de la base gescom.");
            }
        }
    }
}

Dans certains cas vous serez amené à devoir utiliser les deux bases en simultané et à leur permettre d'interagir entre elle, en mettant la base compta à l'attribut CptaApplication de la base gescom, sous peine de vous prendre des erreurs comme quoi une des deux bases est inaccessible :

cial.CptaApplication = cpta;

Récupérer un objet et ses propriétés

Pour vérifier que vous pouvez lire les infos depuis la base compta vous pouvez essayer de lire les infos d'un client, par exemple le client n°1000 :

if (cpta.FactoryClient.ExistNumero(1000))
    objClient = cpta.FactoryClient.ReadNumero(1000);
if (objClient == null)
    return;

Console.WriteLine($"Intitulé du compte 1000 : {objClient.CT_Intitule}");

Pour vérifier que vous pouvez lire les infos depuis la base gescom vous pouvez essayer de lire les infos d'un article, par exemple le prix d'achat de l'article qui porte la référence « BOOK1312 » :

if (!cial.FactoryArticle.ExistReference("BOOK1312"))
    return AdhesionResult.Result.ARTICLE_NOT_FOUND;
IBOArticle3 article = cial.FactoryArticle.ReadReference("BOOK1312");
double prixAchat = article.AR_PrixAchat;

Euh CT_Intitule ? AR_PrixAchat ? Et ça sort d'où ces commandes ExistNumero, ReadReference ? Tout est dans le PDF objets métiers !

Dans la suite de l'article je ne recopie pas toutes ces lignes, mais toute manipulation en lecture et en écriture avec les objets métiers doit se faire avec la ou les bonnes connexions ouvertes. C'est relativement rapide donc à moins d'un gros flux de requêtes ça n'a pas l'air de poser problème d'ouvrir et fermer la connexion à chaque opération.

Récupérer un ensemble d'objets

Je ne vais pas rentrer dans les détails ici mais la plupart des objets qui peuvent se lister ont une classe associée nommée Factory, e.g. IBOArticleFactory3, qui renvoient des collections, et ces objets peuvent être énumérés. Là encore il y a des explications succinctes mais suffisantes dans les PDF. Comme expliqué plus haut, je trouve que l'interface est trop limitée par rapport à une requête SQL, mais peut-être que je n'ai juste pas passé assez de temps à essayer d'arriver à mes fins avec leur API.

Modifier des infos contenues dans Sage

On va donc voir ici comment utiliser les objets métiers pour ça. Si c'est pas déjà fait, je vous conseille de parcourir le PDF objets métiers car je vais me concentrer sur des exemples d'utilisation concrets et qu'il y a des concepts expliqués à ne pas louper comme la persistance des données, les champs par défaut de certains objets lors de leur création, etc. Cela dit, le PDF n'est pas toujours très précis et il vaut mieux faire ses tests ponctués de Console.WriteLine pour s'assurer qu'on a bien tout compris.

Exemple simple : changer l'intitulé d'un client

On chope l'objet client qui porte le numéro 123 et on met son intitulé de compte (nom de société, nom prénom, etc) en majuscules. Oui c'est nul mais c'est pour la démo :

// 1) On récupère l'objet client.
if (cpta.FactoryClient.ExistNumero(123))
    client = cpta.FactoryClient.ReadNumero(123);
if (client == null)
    return;
// 2) On fait notre traitement, on change l'attribut qui va bien.
string nom = client.CT_Intitule;
nom = nom.ToUpper();
client.CT_Intitule = nom;
// 3) On sauvegarde nos changements.
client.Write();

Ce qu'il faut noter ici c'est qu'on peut lire et écrire les attributs de nos objets métiers comme on veut, mais que les modifications ne sont pas enregistrés en base de données tant qu'on n'a pas utilisé Write() (ou WriteDefault()). C'est seulement après cet appel que les modifications sont écrites en base de données. La validation des données—la taille des strings, des valeurs autorisées ou non, etc—se fait à deux endroits, parfois à l'assignation d'une valeur dans un champ, et parfois au moment de l'écriture, et c'est pourquoi il vaut mieux englober toute ses manipulation dans des gros blocs de capture d'exception parce que ça peut péter à de multiples endroits.

Exemple un peu moins simple : changer tout un tas d'infos client

Pareil que l'exemple précédent mais avec plus de modifications. On imagine un objet adhesion qui contiendrait les infos fournies par une API externe sur une nouvelle adhésion, et qu'on voudrait utiliser pour mettre à jour les infos de nos comptes clients.

Notez ici l'existence de l'objet client.LivraisonPrincipal, de type IBOClientLivraison3, et qu'on met à jour en simultané de notre objet client. Dans les deux cas, les infos d'adresse sont dans un sous-objet astucieusement nommé Adresse.

// On remplace tout un tas de champ par ceux de notre objet adhésion.
// Notez comment on tronque certaines chaînes, car elles peuvent avoir
// une limite de taille (pas toujours clairement précisée d'ailleurs…)
client.CT_Intitule = adhesion.FullName;
client.CT_Classement = Utilities.Truncate(adhesion.FullName, 17);
client.CT_Contact = adhesion.FullName;
client.LivraisonPrincipal.LI_Contact = adhesion.FullName;
client.LivraisonPrincipal.LI_Intitule = adhesion.FullName;

address = Utilities.Truncate(adhesion.Address, 35).ToUpper();
client.Adresse.Adresse = address;
client.Adresse.Complement = "";
client.LivraisonPrincipal.Adresse.Adresse = address;
client.LivraisonPrincipal.Adresse.Complement = "";

zipCode = Utilities.Truncate(adhesion.ZipCode, 9).ToUpper();
client.Adresse.CodePostal = zipCode;
client.LivraisonPrincipal.Adresse.CodePostal = zipCode;

city = Utilities.Truncate(adhesion.City, 35).ToUpper();
client.Adresse.Ville = city;
client.LivraisonPrincipal.Adresse.Ville = city;

payerCountry = Utilities.Truncate(adhesion.PayerCountry, 35).ToUpper();
client.Adresse.Pays = payerCountry;
client.LivraisonPrincipal.Adresse.Pays = payerCountry;

phone = Utilities.Truncate(adhesion.phone, 21);
client.Telecom.Telephone = phone;
client.LivraisonPrincipal.Telecom.Telephone = phone;

// On met à jour un champ d'information libre, identifié par son nom dans Sage.
// Attention à bien utiliser le bon type, SSMS peut être utile ici
// pour récupérer le type de la colonne correspondante.
DateTime dateTime = Utilities.ParseRfc3339(adhesion.Date) ?? DateTime.Now;
client.InfoLibre["Dernière année d'adhésion"] = dateTime.Year.ToString();

// On écrit l'objet client mais aussi l'objet LivraisonPrincipal.
// Pas sûr que ça soit super utile mais j'ai pas bien compris
// à quel point les objets s'écrivaient en cascade ou pas,
// et ça ne coute pas grand chose de toute façon.
client.Write();
client.LivraisonPrincipal.Write();

Exemple avancé : créer une facture

Dans ce dernier exemple, je vais créer une facture et l'enregistrer. On utilise un objet un peu particulier, le résultat de CreateProcess_Document, qui émule les actions qu'un utilisateur pourrait avoir en utilisant l'interface graphique de Sage (son « processus », d'où le nom de “process”).

// On va créer une facture pour un article avec cette référence et cette gamme.
string refArticle = "BOOK1312";
string refGamme = "Collector";

// On crée le process. On va interagir à la fois avec cet objet,
// et aussi avec l'objet IBODocumentVente3 qu'il contient.
DocumentType docType = DocumentType.DocumentTypeVenteCommande;
IPMDocument process = cial.CreateProcess_Document(docType);
IBODocumentVente3 facture = (IBODocumentVente3)process.Document;
// On commence par écrire les attributs par défaut :
facture.SetDefault();
// On attribue un objet client récupéré plus tôt :
facture.SetDefaultClient(client);
// On attribue un numéro de pièce :
facture.SetDefaultDO_Piece();
// On modifie quelques attributs supplémentaires selon nos besoins :
facture.LieuLivraison = client.LivraisonPrincipal;
facture.DepotStockage = cial.FactoryDepot.ReadIntitule(adhesion.Depot);
facture.DO_NoWeb = "CMD_123456";
facture.DO_Ref = "XX123456";
facture.DO_Date = dateTime; // objet de type DateTime

// Est-ce l'article demandé existe bien ?
if (!cial.FactoryArticle.ExistReference(refArticle))
    return "ARTICLE_NOT_FOUND";
IBOArticle3 article = cial.FactoryArticle.ReadReference(refArticle);

// Est-ce que la gamme de l'article demandée existe bien ?
if (!article.FactoryArticleGammeEnum1.ExistEnumere(refGammeType))
    return "GAMME_NOT_FOUND";
IBOArticleGammeEnum3 gammeType = article.FactoryArticleGammeEnum1.ReadEnumere(refGammeType);

// On ajoute notre ligne de facture avec un article en utilisant sa gamme.
// Voir également dans les docs : AddArticle, AddArticleDoubleGamme.
process.AddArticleMonoGamme(gammeType, 1);

// Création de l'acompte.
// Bon là je fais n'importe quoi, c'est pour l'exemple.
if (adhesion.ItemAmount > 0)
{
    IBODocumentAcompte3 acompte = (IBODocumentAcompte3)facture.FactoryDocumentAcompte.Create();
    acompte.SetDefault();
    acompte.DR_Date = dateTime;
    acompte.DR_Montant = ((double)amount) / 100; // attention aux types…
    // Je mets le bon réglement…
    if (!acompte.Reglement.FactoryReglement.ExistIntitule("ABC"))
        return "REGLEMENT_NOT_FOUND";
    acompte.Reglement = acompte.Reglement.FactoryReglement.ReadIntitule("ABC");
    // Je mets le bon code journal pour l'acompte…
    if (!cpta.FactoryJournal.ExistNumero("DEF"))
        return "CODE_JOURNAL_NOT_FOUND";
    acompte.Reglement.JournalClient = cpta.FactoryJournal.ReadNumero("DEF");
    // Enfin, je n'oublie pas d'écrire mon objet d'acompte.
    acompte.Write();
}

// L'objet process a un attribut qui permet de vérifier
// s'il n'y a pas d'erreur à la création.
if (!process.CanProcess)
{
    foreach (IFailInfo error in process.Errors)
    {
        Logger.LogError(
            "Impossible de créer le document : {n} {text}",
            error.Indice,
            error.Text
        );
    }
    return "CANT_CREATE_DOCUMENT";
}
Logger.LogInformation("Document prêt pour création.");

// Enfin, on enregistre les objets.
process.Process();
Logger.LogInformation("Document créé.");
client.Write();
client.LivraisonPrincipal.Write();
Logger.LogInformation("Compte client et adresse de livraison principale mis à jour.");

Si tout se passe bien, on se retrouve avec un bon de commande dans Sage que l'on peut ensuite passer en facture comptabilisée à la main.

Conclusion

L'autre API dont je n'ai pas parlé, notre module d'intranet, permet de récupérer les infos d'adhésion depuis HelloAsso et de les traiter avec une file de messages, avec une interface graphique sympa, une base de données PostgreSQL, et tout un tas de choses que je maîtrise bien mieux qu'une API en C# sur un serveur Windows derrière N firewalls et un VPN. C'est vachement plus simple de gérer les notifications en provenance de HelloAsso depuis ce module que depuis Passage, qui peut donc ne contenir que du code en rapport avec la base SQL ou les objets métiers et des contrôleurs les plus légers possible.

J'espère que cet article sera utile parce que j'ai passé pas mal de temps à m'y retrouver dans cet écosystème hostile. N'hésitez pas à m'écrire si vous avez besoin d'un coup de main, je ne garantis pas de pouvoir répondre rapidement mais j'essayerai et je pourrai compléter cet article en conséquence.

#backfromthecodemines

 
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from Laërte

Si vous allez au cinéma régulièrement, il est probable que sans le savoir, vous ayez admiré des paysages, des ciels, ou des planètes générés à l’aide d’un logiciel nommé Terragen. Il suffit de jeter un œil sur le site internet officiel du logiciel pour s’en rendre compte.

Terragen classic

Lorsqu’on a en mémoire les communautés autour digital art d’il y a une vingtaine d’années, un contraste étonnant se forme. Pour ceux qui s’en souviennent, Terragen faisait alors partie de ces logiciels utilisés par une foule de passionnés, et les rendus qui en étaient tirés transpiraient souvent le manque de compétence technique typique d’amateurs enthousiastes. Aujourd’hui, son nom n’est que rarement évoqué. Quand il l’est, c’est soit en référence à cette période, soit dans un contexte professionnel, dans le petit monde de l’imagerie numérique pour le cinéma.

Mais je saute des étapes. Je vous parle d’un logiciel, sans même vous le présenter.

Terraquoi ?

Terragen est un logiciel servant à créer des paysages virtuels. Une interface permet d’y renseigner tout un tas de paramètres, et puis de cliquer sur un bouton afin de, quelques minutes ou quelques heures plus tard, disposer d’une vue détaillée d’un lieu imaginaire.

Canyon boueux généré avec terragen

Je ne connais pas la date de naissance exacte du logiciel, mais des versions existaient déjà en 1999, et il a régulièrement reçu des mises à jour jusqu’en septembre 2005.

En décembre 2006, Terragen 2 a commencé à pointer le bout de son nez sous la forme d’une technology preview. Il s’agissait d’une refonte complète plus que d’une simple mise à jour. Le logiciel est devenu infiniment plus versatile et plus puissant, mais aussi bien plus complexe. Terragen 4, la version actuelle se situe dans la continuité de cette seconde mouture, et est le résultat d’amélioration successives et d’ajouts progressifs de fonctionnalités. La rupture technologique entre ce qui a été à posteriori appelé Terragen Classic et Terragen 2 ne s’est jamais reproduite.

Coucher de soleil poussiéreux généré avec terragen

Communauté

Remontons le cours du temps, et plongeons dans l’âge d’or des débuts de ce logiciel, entre 2000 et 2008 environ. La présence sur internet de Terragen à cette époque était assez caractéristique de ce qu’était le web. Des forums y étaient dédiés, des sites personnels hébergeaient des galeries d’amateurs passionnés, des sortes de réseaux sociaux spécialisés permettaient l’échange et le partage d’images, et le début de la grande épopée des blogs a aussi été l’occasion pour des créateurs de partager leur travail.

Rayon de lumières dans une brume verte et jaune sur un paysage montagneux généré avec terragen

Rien que chez les francophones, j’ai souvenir de deux forums aujourd’hui disparus : celui de Christian Fly, et un autre sobrement appelé Planete Terragen.

Il est difficile aujourd’hui de se rendre compte de la vivacité des échanges dans toutes ces communautés, et encore plus de la masse d’images publiée quotidiennement. Une des plateformes centralisant des rendus Terragen était Renderosity. Ce site (et ses publicités infernales) existe toujours, et permet une plongée dans le passé. En regardant dans la section Terragen du site, on peut se rendre compte par exemple que durant l’été 2004, au moins une quinzaine d’images était publiée tous les jours. Je me souviens d’ailleurs qu’à cette époque, lorsque je partais en vacances pendant quelques semaines, j’avais au retour parfois jusqu’à des milliers d’images nouvelles à regarder, et des centaines de discussions à parcourir, des dizaines de messages auxquels répondre, etc.

Ce fourmillement créait une émulation internationale, et il suffisait d’un tutoriel (qui se retrouvait traduit dans la foulée dans 4 ou 5 langues) pour que des plâtrées d’images exploitant la technique expliquée soit publiées dans les jours qui suivent. Très vite, sous l’effet de cette communauté hyperactive, Terragen est devenu un terrain d’expérimentation : en plus des paysages pour lesquels il avait été créé, ses rendus pouvaient alors prendre des formes plus étranges ou plus abstraites.

Nébuleuse spatiale générée avec terragen

Le succès de Terragen n’est pas une surprise. Le début des années 2000 est la période durant laquelle les accès à internet se sont réellement démocratisés, et la présence d’un ordinateur dans le foyer devenue courante. La curiosité envers cet outil et les nouvelles perspectives qu’il offrait (notamment concernant la création graphique), cumulée à une recherche d’information et des échanges facilités sur n’importe quel sujet favorisait pleinement l’émergence d’un tel phénomène. Aussi, il disposait d’une version gratuite, certes limitée, mais correspondant assez bien aux spécifications des ordinateurs de l'époque : une plus haute résolution de sortie, ou utiliser des terrains plus grands et mieux définis sont toujours bienvenus, mais n’oublions pas les caractéristiques des moniteurs qu'on avait, et que le calcul des rendus pouvait déjà prendre des heures au format de la version de démonstration. Enfin, Terragen était simple à prendre en main. Comparé à d’autres logiciels de création graphique, il était aisé d’arriver à un résultat qui semblait impressionnant au premier abord.

Point de vue depuis une falaise, généré avec terragen

Si son interface était simple, c’est parce que le nombre de paramètres sur lesquels on pouvait agir était réduit. Alors évidemment, passé la découverte, on en veut plus. Le logiciel était bien conçu sur ce point : il était possible d’y ajouter des programmes externes pour générer les heightmaps qui servaient à créer le relief du terrain, et tout était prévu pour que des plug-ins soient créés, et se greffent agréablement au logiciel afin d’augmenter ses possibilités.

Bien entendu, au vu du succès décrit plus haut, des plug-ins permettant de texturer le sol, de modifier les paramètres de l’eau, d’avoir des rendus dans un format meilleur que celui proposé par défaut sont très rapidement arrivés. Et des logiciels tiers permettant de créer des terrains, en importer depuis des images, ou encore de générer des scripts permettant la création d’animations ont été aussi développés dans la foulée.

Dune désertique, générée avec terragen

De nouvelles têtes apparaissaient toutes les semaines, et bien sûr, l’intérêt pour la chose était souvent passager, mais certaines personnes sont restées impliquées des années, et je sais que des amitiés durables se sont parfois liées à l’aide de l’accroche commune qu’était Terragen.

Un héritage brisé

Et puis Terragen 2 est sorti. Sous la forme d’une technology preview, puis d’une beta, et enfin de manière stable. Lorsque les toutes premières images et vidéos annonçant l’arrivée imminente de la chose sont parues, l’effervescence de la communauté était énorme. Et pourtant, de mois en mois, la situation devenait claire : Terragen 2 n’avait pas conquis les foules.

Montagne au dessus des nuages, générée avec terragen 2

Ce constat était juste, et s’est confirmé dans le temps. Alors même qu’une page de la section Terragen de Renderosity arrivait à peine à contenir les images publiées en une journée, aujourd’hui la page affichant les dernières images de cette section remonte de presque 6 mois dans le passé, et quasiment l’ensemble des images que l’on y trouve ont été publiées par 2 personnes. Renderosity n'est plus une plateforme bien connue, mais des sites comme DeviantArt, twitter ou autre ne sont pas plus fournis en contenu créé avec Terragen.

Trop puissant, trop complexe, trop limité dans sa version gratuite, beaucoup de raisons font que nombre d’utilisateurs ont très vite préféré retourner sur l’original. Et le vent avait tourné, les modes changent toujours, et ce type d’activité créative devenait peu à peu de moins en moins attrayant.

Pour autant, ce n’est pas un échec du logiciel. En contrepartie, jamais il n’a eu autant de succès qu’aujourd’hui dans le milieu qu’il vise réellement : celui de l’imagerie de synthèse professionnelle. Mais je ne peux qu’être nostalgique, et légèrement amer de la fin d’une époque de création artistique populaire débridée.

Désert rocailleux, généré avec terragen 2

Le Terragen original dans sa dernière version publiée est resté accessible sur le site de son éditeur pendant des années, sous le nom de Terragen Classic. Avec ses limitations, qui se concevaient en 2003, mais plus du tout passé 2007 ou 2008, alors que la puissance des ordinateurs domestiques et la taille des écrans grand public avaient énormément changés. Et désormais, il n’y apparaît même plus, et n’est plus officiellement disponible au téléchargement ni à l’achat.

Et aujourd’hui ?

Peu à peu, les dernières flammes se sont éteintes, et la lassitude a emporté les dernières énergies. Et aujourd’hui, la première mouture de Terragen et les élans qu’elle a suscités semblent bien lointains. Il reste amusant de remarquer qu’en 2024, les pages Wikipedia concernant le logiciel, qu’elles soient en anglais ou en français comportent des illustrations composées avec cette version obsolète depuis presque 20 ans, preuve de sa présence et de sa force historique, et de sa rare représentation sous sa forme moderne.

Suite à une discussion durant un stream d'Artuan de Lierrée, m’a pris l’envie de réinstaller la chose, et de m’amuser avec. Malheureusement, il ne tourne pas avec wine, mais je n’ai par contre pas eu de déboires à le faire tourner sur Windows 10. Et mes souvenirs sont justes, le logiciel reste agréable à utiliser aujourd’hui.

Et c’est ce qui a amené a faire des rendus Terragen 0.9.43 en 2024.

Reliefs aliens, générés avec terragen Île tropicale générée avec terragen Falaises stratifiées et érodées, générées avec terragen

Par curiosité, j’ai tenté de trouver de l’activité sur internet autour de la chose. Dans l’ensemble il n’y en a pas. Mais une exception a retenu mon attention, cette vidéo que je vous encourage à visionner :

Regarder le making of vous donnera une idée du travail abattu. Il y a des années, j’avais hésité à faire quelque chose de similaire, mais j’avais baissé les bras devant l’ampleur de la tâche. La personne nommée Posy qui a créé la vidéo me semblait inconnue, mais en regardant le making of, son nom apparaît un instant : Michiel De Boer. Cette information n’a rien d’indiscret, il l’affiche en grand sur son site internet. À la lecture de ce nom, des souvenirs ont resurgi… MDB…

Rappelez-vous ma description du bouillonnement d’activités qui existait autour de Terragen. Ce désormais nommé Posy (ou MDB) était là, et il incarne de manière presque emblématique l’époque : il a hébergé sa galerie sur son site personnel, était présent sur Renderosity (il y postait des images, et était aussi très présent dans conversations en commentaires des images d’autres personnes) et a créé un tutoriel qui a fait des émules par dizaines. Il en reste d’ailleurs des traces :

Michiel “MDB” de Boer has written a tutorial describing his “Bliss” Terragen sky effect. MDB is well known for discovering rare gems from his Terragen explorations. Due to persistence, what could have been a glitch, gimmick or oddity is shaping up to be a viable alternative for attractive Terragen skies. Visit the Terragen Renderosity Gallery to see the brief flurry of Bliss images for the dates 8/28 to 8/30, or search “bliss”. In particular, Luc Bianco has very nice results incorporating partial bliss into daylight terrain scenes.

Blog d’Empyrealpixels

Ce n’est au final pas surprenant qu’une vidéo parue en 2023 et mettant en lumière ce logiciel ait été créé par un grand ancien de la scène. Et en tout cas, je suis ravi d’être tombé dessus, et qu’ils soient en recherche de leurs propres souvenirs ou dans la découverte d’un passé inconnu, j’espère que d’autres la regarderont.

Les archives poussiéreuses

Terragen 0.9.43 et son écosystème sont devenus difficiles à dégotter : les sites web qui hébergeaient les différents plug-ins ou logiciels tiers sont à l’arrêt depuis longtemps, ou sont trop anciens pour être recherchés efficacement, le site officiel du logiciel n’évoque même plus l’existence de son propre passé, etc.

Et donc, voici une copie de quelques-unes de ces ressources. Vous y trouverez entre autres :

  • Terragen 0.9.43,
  • quelques plug-ins : SOPack, Waterworks, et d'autres,
  • pour les animations : Terratweak, Campath, et Terranim,
  • pour les terrains : Terrabrush et bmp2ter.

Terragen lui-même est dans sa version de démonstration d’époque, et il n’est pas possible aujourd’hui d’en acheter la version complète. Hisser les voiles et trouver en haute mer des parades à ce problème précis est la seule solution pour ceux qui n’ont pas de licence historique.

Quoi qu’il en soit, je suis très heureux d’avoir été à nouveau mordu par l’envie d’utiliser ce logiciel, et je dois avouer avoir hâte que le rendu que j’ai lancé il y a quelques heures se termine.

#Graphisme #DigitalArt

Source des illustrations :

  • Images personnelles rendues sur Terragen classic, et Terragen 2 pour les deux images de la section qui en parle
 
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from dece

J'aime bien boire du vin, mais je n'aimais pas devoir acheter du vin car je ne comprenais pas grand chose et ça m'empêchait de choisir des bonnes bouteilles, me projetant perpétuellement dans les bras perfides du merlot Roche Mazet. Ma chère et tendre Emma m'a judicieusement offert une journée de formation, la WSET1, qui donne les bases pour comprendre un peu mieux ce qui se passe dans son verre, et cet article vient tenter de résumer ce que j'y ai appris. 🍷🤔

Je vous épargne gentiment les longues énumérations de noms de domaines, de cépages, avec des caractéristiques inertes, parce que ça n'a pas d'intérêt ici.

Les régions et les cépages

Les principales régions viticoles en France sont sur cette carte, qui est la moins illisible que j'ai trouvé mais forcément incomplète et simpliste :

Carte des régions viticoles

On y fait des vins différents mais pour faire simple on peut dire que tout ce qui est au dessus de Lyon est un climat frais, et en dessous c'est un climat chaud.

Ensuite on a les différents cépages, qui est le terme œnologique pour désigner la variété botanique de la vigne, Vitis vinifera. Chaque région a des cépages spécifiquement adaptés à son climat, à son sol. Par exemple dans le Bordelais on utilise beaucoup de cabernet sauvignon, alors que dans le Chablis (dans l'Yonne) on utilise surtout du chardonnay.

Il y a des cépages blancs et des cépages rouges. Ces derniers ont une pellicule chargés en tanins, ce qui donne aux grains leur couleur foncée et au vin rouge son astringence.

La vinification

Le grain se charge en sucre et en eau sous l'influence de la chaleur et du Soleil, et perd en même temps en acidité. Ce phénomène est plus important dans les climats chaud.

On a ensuite plusieurs opérations à réaliser, pas toutes et pas dans le même ordre selon si on fait du vin blanc ou du vin rouge !

Le foulage est le fait de broyer grossièrement des grains récoltés, ce qu'on faisait autrefois aux pieds. 💃🍇

La fermentation est l'action des levures, souvent ajoutées, pour consommer les sucres et produire de l'alcool et du dioxyde de carbone (c'est quoi le bilan carbone du vin tiens ?). Ça peut durer de quelques jours à quelques mois. 🫧

Le soutirage est l'extraction du vin depuis le moût. On a alors le vin de goutte, liquide, et le vin de presse, solide. 🌊

Le pressurage consiste à presser le moût (pour le vin blanc) ou les pellicules (pour le vin rouge). ⚙️

L'élevage est la mise au repos du vin pendant quelques mois à quelques années, dans des cuves en inox ou dans des fûts de chêne, ou si on veut tricher un peu dans des cuves en inox où l'on a mis des morceaux de chêne, parce que l'intérêt est quand même de donner un goût boisé au vin. ⏱️

Enfin, il y a la mise en bouteille. 🍾

Vins blancs

  1. Foulage
  2. Pressurage des grains pour récupérer tout le jus.
  3. Fermentation
  4. Élevage
  5. Mise en bouteille

Vins rouges

  1. Foulage
  2. Fermentation du vin avec toute la matière solide (pellicules, pépins)
  3. Soutirage
  4. Pressurage du vin de presse pour extraire tout le vin restant
  5. Élevage
  6. Mise en bouteille

Vins rosés

Le vin rosé est fait comme le vin rouge, sauf que lors de la fermentation on ne laisse que très peu de temps, quelques heures seulement, le jus avec la matière solide, ce qui l'empêche de prendre trop de tanins et de trop se colorer. On soutire donc très tôt, et la fermentation continue avec le liquide uniquement ensuite.

On voit alors qu'on peut faire du vin blanc à partir de cépages rouges : il suffit de ne pas laisser la matière solide pendant la fermentation. L'inverse, faire du vin rouge avec des cépages blancs, est impossible.

Caractéristiques de vins

Types

On parle de vins tranquilles pour la plupart d'entre eux. On laisse la fermentation se terminer d'elle-même, et le dioxyde de carbone s'échapper. Ils portent les noms de leur région de production ou de leur cépage.

Les vins effervescents sont mousseux/pétillants comme le champagne ou le prosecco. On essaye soit de conserver le dioxyde de carbone produit par les levures, ou alors on triche et on le rajoute après.

Les vins fortifiés sont ceux où il y a eu ajout d'alcool, comme le porto. Cela permet de stopper la fermentation en tuant les levures et de conserver du sucre dans le vin, ce qui donne d'excellents vins apéritifs.

Douceur

On a un spectre entre d'un côté les vins dits sec, et de l'autre ceux dits doux ou rond. Les vins secs sont peu sucrés car les sucres ont été entièrement consommé par les levures. Les vins de douceur moyenne ont encore un peu de sucre car les levures n'ont pas tout consommé, ou bien du jus de raison non fermenté a été ajouté. Les vins doux ont typiquement beaucoup de sucre initialement, ou bien c'est du vin fortifié.

Acidité

L'acidité d'un vin fait saliver. Elle permet également de tirer en longueur, dans le temps, l'effet des saveurs en bouche. Vins acides : chablis, riesling, sauvignon blanc, etc. L'acidité ne sent rien, elle se goûte.

Tanins

Les tannins sont des particules astringentes, qui provoquent comme une sécheresse en bouche, donc c'est plus une sensation qu'une saveur. Vins tanniques : les bordeaux, le chianti, etc. Les tanins ne se sentent pas.

Alcool

On a normalement entre 11.5° et 15° d'alcool dans un vin. L'alcool remplit surtout un rôle social. L'alcool se sent.

Corps

On dit d'un vin qu'il a du corps selon… euh… qu'il prend de la place dans la bouche ? Contrairement à un vin plus délicat, plus subtil ? Ça me semble pas très clair ni très utile comme critère.

Balance acidité, tanins, alcool et sucre

Une façon de voir l'équilibre des goûts dans le vin est de voir d'un côté l'alcool et le sucre, et de l'autre l'acidité et les tanins. Un bon vin parviendra à trouver son propre équilibre !

Odeurs et saveurs

À chaque cépage, territoire, vin, son ensemble de saveur ! L'exercice de décrire les saveurs d'un vin paraît parfois trop sophistiqué mais si on se laisse prendre au jeu d'écouter au maximum ses sens et d'attraper les mots dès qu'ils nous passent en tête, on se retrouve vite à dire des choses plus complexes qu'on ne l'aurait imaginer : mûre, brioche, pomme verte, bouquets de fleurs, tarte tatin, saumon fumé, etc.

Il y a des saveurs qui reviennent souvent comme le citron, la cerise, la vanille, le bois fumé, mais plutôt que de retenir quel vin goûte typiquement quelle saveur, je trouve ça plus intéressant d'essayer à chaque fois de trouver ce à quoi ça nous fait penser.

Quand on découvre un vin, on commence par le sentir. On peut le sentir directement après l'avoir versé, puis le faire tourner dans son verre et sentir de nouveau, des fois l'odeur est légèrement différente, plus forte, plus riche.

Accords mets et vins

Bon j'ai pas retenu grand chose, mais c'est intéressant de voir que nos papilles sont facilement occupées par un aspect du plat qu'on mange au point d'annuler ces mêmes aspects dans le vin qu'on boit. Par exemple, manger une entrée forte en acidité (pamplemousse, pomme) atténue fortement l'acidité d'un vin blanc sec comme un chablis, ce qui lui permet de laisser parler ses touches fruitées. Autre exemple, un plat bien mijoté comme du bœuf bourguignon et salé juste ce qu'il faut va réduire les tanins d'un vin rouge qui paraîtrait pourtant fort astringent s'il était bu seul.

Ceci dit, un bon plat et une bonne bouteille, ça s'accorde en général bien sans trop faire attention pour la majorité des gens. Mais bon un gâteau au chocolat avec un porto là, pfouah…

stock photo de vin

Ce sur quoi je passe

Comment ouvrir une bouteille, la liste des cépages et régions internationales de la WSET1, les odeurs et saveurs typiques de tels cépages et telles régions.


Wouaaah merci dece pour ces notes trop courtes pour être utiles à quiconque 🤩

OK alors on se calme tout de suite ! J'aimerais tenter une alternative à ma technique de prise de notes actuelle qui suit à peu près la méthode PARA en couplant quelque chose qui s'approche du Memex de Cory Doctorow pour certains contenus, l'idée principale étant que la mise à disposition au public implique une rigueur dans la prise de note, la compréhension du sujet et un partage d'information. Mon wiki contient moult fiches qui auraient gagnées à être des contenus publiés, marqués dans le temps ou progressivement mis à jour. Cet article est donc un premier test dans cette direction, plutôt que de croupir hors-ligne ! Projet Xanadu me voici !!

Côté vin je vais voir si c'est intéressant de tenir une liste des bouteilles que j'ai pu boire avec mes impressions. « Hmm… ce Côtes du Rhône Franprix a un nez surprenant… » ou encore « Aaah, je sens que je suis bourré ».

 
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from dece

Sur l'atlas des odonates (libellules et demoiselles), on a une problématique d'incertitude concernant l'autochtonie des espèces sur les mailles où elles ont été observées. Vous n'avez pas forcément besoin de comprendre cette phrase pour lire cet article, tant que vous aimez bien les problématiques de gestion de données et les regex.

L'autochtonie ? Les exuvies ?

OK, petit lexique.

Atlas : un ensemble de cartes représentant la présence ou non d'espèces sur un territoire donnée, généralement par maille.

Maille : une zone, un carré sur la carte. Par exemple en France on utilise souvent des mailles de 10km² tracées avec une projection Lambert93, ce qui donne des mailles identifiables avec un code tel que 10kmL93E024N677.

Autochtonie : une espèce est autochtone sur un lieu si on peut y observer la reproduction, la ponte, la naissance, etc ; en gros, qu'on ne l'a pas observée juste de passage, comme ça peut arriver avec les odonates qui peuvent se balader loin de leur lieu de naissance et de reproduction.

Exuvie : la mue laissée par la larve d'odonate avant qu'elle « émerge » en tant qu'individu adulte. Quelques photos dans cette clé d'identification. Si on trouve une exuvie quelque part, c'est donc qu'il y a bien eu émergence d'adulte, et donc que l'espèce observée est autochtone à cet endroit (Ruffoni, 2018).

Les données

On utilise une extraction OpenObs pour alimenter notre atlas, et ces tables contiennent un champ “Stade de vie” mais celui-ci n'est pas toujours renseigné correctement à cause de l'hétérogénéité des jeux de données et des plateformes de saisie utilisées. Si on regarde bien cependant, l'information peut parfois être retrouvée dans le champ “Commentaires” de l'observation, où l'observateur, parfois le producteur de la donnée, nous gratifie d'informations plus ou moins cryptiques, à propos de l'observation, ou de la météo, ou de son humeur… Dans cet article on va donc se pencher sur ce champ de commentaires et voir comment on peut l'utiliser au mieux pour améliorer les infos d'autochtonie.

Beaucoup des idées ci-dessous proviennent des conseils d'Alexia, notre géomaticienne avec qui j'ai la joie quotidiennement renouvelée de travailler 😌

Les regex ci-dessous sont au format PCRE2 (PHP 7.3 et plus). J'ai remplacé les noms qui apparaissaient dans les commentaires par […].

Pourquoi on ne peut pas juste grep exuvie

On ne peut pas se baser simplement sur la présence du mot « exuvie » en commentaire d'une observation pour pas mal de raisons.

Déjà parce que parfois, c'est écrit « pas d'exuvies ». OK donc on n'a qu'à faire une regex qui enlève « pas [espace] d'exuvies » ; pourquoi pas mais du coup, attention à ne pas ignorer les gros malins qui ont alors commenté « pas mal d'exuvies » ! Il y a aussi quelques commentaires dans d'autres langues, notamment en allemand : « viele exuvien » (plein), « altere Exuvien » (anciennes), « frische Exuvien » (fraîche), « keine Exuvien » (aucune). Exemples relous :

  • Toutes émergented, pas mal d'exuvies dans les iris
  • 4 - males uniquement pas trouve d'exuvie à ce jour
  • pas encore trouvé d'exuvies
  • M et F adultes et 1 M immatures tres tres frais (quasi emergent mais pas vu l'exuvie!). Observations en compagnie de […].

Parfois le commentaire est utilisé pour décrire d'autres éléments de l'observation, qui mentionnent le terme d'exuvie mais sans être en rapport avec la quantité d'exuvies trouvées dans l'observation. Quelques exemples :

  • Formation odonate et identification des exuvies organisée par l'ALEPE avec […] et […]
  • rem. orig. : B, prospection exuvies, tronçon 2- src : Gard Nature - prot : Observation occasionnelle
  • territorialié- id_source : 10923- BDD_exuvies2015_modif_export.xlsx- 20161017

À moins de faire une regex particulièrement illisible et constamment incomplète, c'est impossible d'utiliser un modèle de denylist pour vérifier les exuvies, et donc détecter uniquement la présence du mot exuvie n'est pas satisfaisant pour notre besoin ici. On va donc écrire une regex dont on utilisera les matchs pour affirmer la présence d'une exuvie, quitte à avoir des faux négatifs, mais avec presque aucun faux positifs.

Détails, astuces et mauvaises idées

Si on souhaite se restreindre au modèle « [nombre] exuvie », il faut faire attention à ignorer tous les commentaires qui disent gentiment qu'il y a « 0 exuvies » (mais pas ignorer « 10 exuvies » !). Bien entendu c'est parfois écrit en toutes lettres : « Une exuvie », « Trois exuvies », « Quatre exuvies ».

On aimerait bien ignorer les commentaires qui disent « aucune exuvie » ou « pas d'exuvie », mais évidemment des petits malins ont commenté « Pas mal d'exuvies » 😭

On serait tenté de capturer plus de résultat en réduisant la recherche à « exu » car beaucoup de commentaires utilisent « ex » ou « exu » car « exuvie » c'est trop long à écrire j'imagine, mais c'est sans compter la présence de mots comme « exutoire ». On a aussi envie de match les chaînes « exuvies trouvées » ou « exuvies récoltées », mais elles semblent pouvoir apparaître autant dans des affirmations positives que négatives !

Parmi d'autres détails, l'orthographe officielle est « exuvie » mais elle est parfois orthographiée « éxuvie ». Enfin, la gestion de la casse est un problème de tous les instants, et il peut être intéressant de commencer par passer l'entièreté de son jeu de données en minuscules pour simplifier l'écriture des regex ensuite, ou d'ajouter le flag i à ses patterns pour ignorer la casse.

Protocole

Préparation des données

Depuis une extraction d'OpenObs des insectes, préalablement filtrée sur l'ordre Odonata, on extrait les observations dont les commentaires (colonne 80) contiennent le mot « exuvie » avec l'excellent csvgrep :

csvgrep
    -c 80 \
    -r "[eEéÉèÈ]xuvie" \
    extractINPN_insectes_21092023_Odonata.csv \
> /tmp/exuvia.csv

On récupère la liste de ces commentaires dédupliqués et triés pour pouvoir tester nos regex facilement :

… | csvcut -c 80 | sort -u > commentaire_exuvie_uniq.txt

Ce fichier fait 4306 lignes.

Compter les commentaires les plus simples

Si le commentaire commence par « exuvie », sans compter quelques caractères parasites, alors nous n'avons pas trouvé de contre-exemples au fait que l'observation concerne bel et bien une ou plusieurs exuvies.

Regex : /^[\-\*\+]? *[eé]xuvie/i

Rien qu'avec cette regex on a 348 matchs.

Repérer les comptages d'exuvies

À défaut de pouvoir proprement ignorer les commentaires stipulant qu'il n'y a pas d'exuvies parce qu'on ne sait jamais quand un odonatologue décidera d'annoter dans son patois qu'il n'a vu aucune exuvie, on peut essayer de cibler au mieux la présence d'un certain nombre d'exuvie, que ça soit en chiffres ou en toutes lettres.

Pour les chiffres, sont valides les nombres à un chiffre de 1 à 9, ou n'importe quel chiffre à partir de 2 chiffres par nombre. Théoriquement ça fait que « 00 exuvie » match, mais bon… Attention en revanche à la pattern /une exuvie/ car elle match la chaîne « aucune exuvie » 🫠 un petit negative lookbehind est donc de rigueur.

On améliore ses résultats en ignorant certaines qualificatifs comme « ancienne » ou les genres. On détecte les m et f, voire mf qui servent à genrer les nombres, et les x neutres. Comme on est sympa, on match aussi les nombres en toutes lettres (enfin de un à neuf). On trouve également parfois des quantificateurs flous mais utiles, comme « nombreuses exuvies » ou « plusieurs exuvies ».

Regex : /(([0-9]{2,}|[1-9])(x|m|f|mf)?|(?<!auc)une|qq|qlq|quelques|deux|trois|quatre|cinq|six|sept|huit|neuf|nombreuses|plusieurs)([[:blank:]](m[aâ]les?|femelles?|anciennes?|vieilles?))?[[:blank:]]?[eé]xuvie/i

Dans le détail :

/(
    ([0-9]{2,}|[1-9])
    (x|m|f|mf)?
|
    (?<!auc)une
|
    qq|qlq|quelques|deux|trois|quatre|cinq|six|sept|huit|neuf|nombreuses|plusieurs
)
([[:blank:]](m[aâ]les?|femelles?|anciennes?|vieilles?))?
[[:blank:]]?[eé]xuvie
/xi

Tout de suite on passe à 2767 matchs !

En général il semble plus prudent de ne pas supprimer les virgules car on n'est jamais à l'abri d'un naturaliste fou qui aurait écrit « larves 4, exuvies 0 », qu'un filtre trop enthousiaste interprèterait comme « larves 4 exuvies 0 » et bondirait sur « 4 exuvies ». En revanche, s'il n'y a rien après la mention d'exuvie, on peut se permettre de compter dans un match une virgule entre un comptage et le mot exuvie, ce qui permet de match une bonne dizaine de cas supplémentaires.

Regex :

/(([0-9]{2,}|[1-9])(x|m|f|mf)?){1,2},?[[:blank:]]?[eé]xuvies?$/i
                               ^^^^^
                               un ou deux groupes (e.g. 1m, 2f, 3m4f, …)

Quelques cas autres intéressants

D'autres quantificateurs imprécis mais on notera le « d' » avant le mot exuvie.

Regex : /(dizaines?|centaines?)[[:blank:]]d'[eé]xuvie/i

Enfin le mot « présence » est souvent utilisé aussi.

Regex : /pr[eé]sence[[:blank:]](?:d'|de\x20l')[eé]xuvie/i

Ce qui nous fait passer à 2828 matchs.

Regex finale

/(
  ^[\-\*\+]?[[:blank:]]*[eé]xuvie
|
  (([0-9]{2,}|[1-9])(x|m|f|mf)?|(?<!auc)une|qq|qlq|quelques|deux|trois|quatre|cinq|six|sept|huit|neuf|nombreuses|plusieurs)([[:blank:]](m[aâ]les?|femelles?|anciennes?|vieilles?))?[[:blank:]]?[eé]xuvie
|
  (([0-9]{2,}|[1-9])(x|m|f|mf)?){1,2},?[[:blank:]]?[eé]xuvies?$
|
  (dizaines?|centaines?)[[:blank:]]d'[eé]xuvie
|
  pr[eé]sence[[:blank:]](?:d'|de\x20l')[eé]xuvie
)/xi

Au final c'est surtout la deuxième partie, où on cherche « [nombre] exuvie » qui rapporte un maximum d'information, en tout cas sur la diversité des commentaires disponibles car il ne faut pas oublier que les nombres de matchs donnés correspondent à un jeu dé-dupliqué.

Conclusion

Et voila, dans la pratique ça nous a permis d'augmenter significativement le nombre d'observations avec des infos d'autochtonie renseignées :

  • Avant : 15462 en autochtonie possible, 22685 en autochtonie probable, 23466 en autochtonie certaine ;
  • Après : 15456 en autochtonie possible, 26492 en autochtonie probable, 33766 en autochtonie certaine, soit +30% !

Comment améliorer la situation ? On voit que certains commentaires essayent de suivre une certaine nomenclature en décrivant les exuvies observées, en ajoutant m et f pour genrer les individus et/ou les exuvies, ce qui donne des entrées comme 2m3f,exuvie pour signaler 2 mâles et 3 femelles. Sont-ce les exuvies qui sont genrées ? Ou des individus observés, auquel on annote qu'il y avait également des exuvies sur le lieu ? Impossible de savoir à moins de contacter l'observateur.

Avec les regex présentées ici, on loupe évidemment une masse de commentaires qui décrivent beaucoup trop de choses, utilisent des abréviations obscures, une syntaxe chaotique, mais vouloir prendre en considération tout ces cas pour un traitement automatisé nécessite un temps que personne n'a ; il y a toujours moyen, théoriquement, d'affiner les regex pour ajouter des cas. Pour les données existantes, la seule solution exhaustive est donc une ✨validation manuelle✨ !

Pour la création de données futures en revanche, la meilleure solution semble être de travailler sur des interfaces qui facilitent au maximum la saisie de données et donner à chaque caractéristique de l'observation des champs clairs, typés et avec des contraintes, pour que l'observateur ait pu tout renseigner aux emplacements adéquats et réserver à la case commentaire sa prose lyrique ou ses souvenirs de pique-nique sur le site de l'observation, mais on n'y est pas encore tout à fait !

Bonus

Des commentaires que j'ai bien aimé même s'ils sont impossible à traiter :

  • - sur roseaux de l'etang, sortent des exuvies merci pour le haiku
  • Filet � papillon / Recherche d�exuvies
  • Ma première exuvie... 🥲
  • 1h de recherche d'exu exuvie / BAM !!! / exu récoltée et mise en collection dans frigo BAM
  • Belle surprise ! bientôt des exuvies dans le 77 ?!! woohoo !
  • rem. orig. : beau, solei,l vent , nuages, jour de ponte pour le napolitain, vu 4 tandem en ponte, dont un où le mâle se faisait agresser par 2 orthetrum cancellatum qui lui fonçaient dessus en piquet, j’ai cru que l’un d’eux allait lui arracher la tête, 😨
  • 1x femelle individu mature (en main)- à valider, aeshna cyanea, remarque : rentre dans la maison et sauvée des chats! me mord le doigt jusqu'à faire saigner, re lachée saine et sauve.- id_flr :3125315 🙀
  • enfin un imago observé dans ce secteur où une larve et une exuvie ont été trouvées en 2015 et 2016 ! ← mauvaise idée d'écrire dans le commentaire d'une observation des informations à propos d'une autre observation !
  • Spectre paisible. détail : , 1x individu mature. remarque : rentre dans le Petit Moulin, avec […] et […], j'ai trouvé aussi une exuvie il y a quelques jours au bord du Lauquet - id_biolovision : 3021488 pareil
  • Sympa pendant le pique-nique du WE canoé SfO ! - Nombreuses exuvies trouvées sur la Marne, la découverte nord-77 de 2015 ! woohoo un pique-nique ! 🧺🥪🧃
  • entre la Chaise et la D81 --------- Champs importes --------- COMMENTAIR r‚cup‚ration d'exuvies j_CODE_ETUDE COEMER j_CODE_SITE S63 j_METEO NUAGEUX j_TEMPERATUR 25 j_VENT FAIBLE bon allez assez entendu
 
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from dece

Par manque de temps j'ai écrit ma liste de lectures, habituellement destinée à ma capsule Gemini, en français, et ça m'embête de poster du contenu non traduit là-bas, et d'un autre côté je suis content d'alimenter cette instance WriteFreely où Laërte et Mystr (en privé) postent déjà du contenu in·cro·yable, donc je pose ça ici pour l'instant.

Baptiste Morizot : Manières d'être vivant

  • Introduction : la crise écologique comme crise de la sensibilité
  • Une saison chez les vivants
  • Les promesses d'une éponge
  • Cohabiter avec ses fauves
  • Passer de l'autre côté de la nuit
  • Épilogue : les égards ajustés (par Alain Damasio)

Le premier texte mêle une histoire de pistage de loups dans le Vercors avec un essai sur les communs de l'être humain et de ce qu'on appelle la nature, ou les animaux. Un passage notamment traite du fait qu'appeler les autres animaux tel quel, avec ce terme “autre” permet de souligner notre appartenance à un même groupe.

Le second texte traite plus d'évolution. Il passe sur un débat intéressant entre l'évolution qui serait d'une part un pur fruit du hasard, et de l'autre une mécanique qui tendrait forcément vers l'homme, jusqu'à une perfection qu'on ne connaît pas encore ; il présente la théorie plus prometteuse et a priori respectée aujourd'hui parmi les scientifiques que l'évolution par certains caractères se fait parce qu'ils sont simplement avantageux quoi qu'il en soit : les yeux, la photosynthèse, une forme d'intelligence, etc, et on peut le démontrer notamment par le fait que ces caractères ont été développés en parallèle par plusieurs organismes, et non pas par un individu unique quelque part dans l'évolution des espèces, e.g. la photosynthèse qui aurait été développée plus de cent fois indépendamment.

Le troisième texte est un vaste appel à lire Spinoza.

Le quatrième texte raconte l'expérience de l'auteur comme observateur au sein d'un projet de supervision des relations entre les éleveurs, leur bétail, leurs chiens, les loups et les chasseurs. Leurs interactions sont d'une complexité proprement passionnante et permettent à l'auteur de tracer les lignes de la pièce manquante de nos sociétés, la diplomatie entre les espèces.

L'épilogue est du pur Damasio.

C'est une lecture très agréable et j'y ai appris pas mal de choses, mais je me posais quelques questions d'efficicaté politique—surtout après la lecture de l'article de Joseph Confavreux « Le “vivant” noie-t-il le poisson politique ? »—que je voulais poser quelque part sur papier et j'ai oublié.

Frédéric Beigbeder : 99 francs

Une histoire de publicitaire qui pète les plombs. Le livre est écrit comme un roman dont le côté autobiographique est volontairement à peine dissimulé : le personnage écrit un livre pour se faire virer du milieu de la pub, car c'est ce que l'auteur faisait en écrivant ce livre ; méta !

Il y a des bonnes idées mais c'est vraiment une narration de mec de droite qui pense surpasser sa condition de mec de droite ; il y a une scène où les personnages vont tabasser une retraitée de Floride dont les thunes sont probablement dans les larges fonds de pension américains, avec une rhétorique de gauchiste maladroite. L'auteur est étrangement fasciné par l'omnipotence de la publicité et de ce qui serait son pouvoir absolu sur les gens, jusqu'à ce que se confonde la critique et une admiration à peine voilée. C'est aussi très vulgaire sans justification.

Virginie Despentes : King Kong théorie

Virginie Despentes parle de sa conception du féminisme, raconte sa jeunesse, son intimité, son viol, sa prostitution. Un article de Camille Paglia l'encourage à considérer son viol comme étant une conséquence du risque qu'il y a à sortir comme femme libre, et non comme une honte à garder sous silence.

L'essai constitue une porte d'entrée spéciale sur le féminisme et je le recommande à quiconque souhaitant de nouvelles perspectives sur le sujet. Ça m'a beaucoup plu.

Virginie Despentes : Baise-moi

Nadine et Manu se retrouvent simultanément dépourvues de quoi que ce soit à perdre et partent en cavale pour accomplir personne ne sait trop quoi ; expérimenter une jouissance crue et sans compromis sur les routes de France, dont les seuls constantes seront l'alcool, le sexe et le meurtre.

C'est le premier roman de Despentes, dont est issu un film sorti en 2000 qui a été censuré en France. Si on connaît les films God Bless America ou The Devil's Rejects, c'est assez ouf de constater à quel point ce roman possédait déjà tout. C'est plus dur et froid que d'autres romans plus connus de Despentes comme Vernon Subutex, il y a beaucoup de scènes de violence, une scène de viol, plusieurs meurtres notamment envers des personnages qu'on n'est pas habitué à voir tués.

C'est aisément mon roman trash préféré (OK je connais que lui) mais je ne le conseille qu'aux cœurs bien accrochés. La fin est stylée ! 💯

John Fante : Demande à la poussière

Les aventures de Bandini, aspirant écrivain avec un goût immodéré pour les femmes, l'alcool et le scandale, il me fait un peu penser à un copain mais je dirais pas qui. On suit sa vie à Los Angeles, son histoire d'amour avec Camilla la serveuse d'un bar, leurs disputes et leur incapacité à communiquer leurs sentiments. Le désert de Californie est toujours là en train de les menacer de les engloutir sous sa poussière. C'est un roman poignant, à la fois drôle et amer. Ce style crypto-autobiographique où l'on fait comme si on n'écrivait pas sa propre histoire me plaît beaucoup et j'espère avec l'occasion de lire d'autres livres de Fante.

Charles Bukowski : Le postier

L'histoire d'un postier et de ses conditions de travail. Quand les personnages crient, il écrit en majuscule et je trouve ça très appréciable. Bukowski est un peu trop obsédé par le cul, des fois c'est un peu gênant, mais ça a son sens comme échappatoire à l'enfer du taf. Il y a une bonne dose d'humour amer, notamment la scène de cul avec les pots de géraniums qui tombent mais j'en dis pas plus. Attention tout de même des fois ça va trop loin et il y a une scène de viol tout à fait assumée que j'ai trouvé dure à lire.

Mircea Eliade : Le sacré et le profane

Petite introduction à l'étude phénoménologique et historique des faits religieux. On y apprend notamment comment les rituels comme le ramadan ou les rituels saisonnier servent à reproduire un temps originel, sacré, pour ramener à l'existence profane, c'est à dire hors des phénomènes divins, une présence sacrée. On retrouve ce besoin d'amener le sacré également dans les manières d'établir un nouveau village (feu central), dans l'architecture et l'aménagement des maisons.

En tant qu'athée, ce livre m'a permis de mieux saisir comment les personnes religieuses perçoivent l'univers autour d'eux, leur « cosmos », et d'y trouver des similarités avec mes propres habitudes et approches du monde. Il est sans doute utile de préciser que les travaux d'Eliade, même s'ils sont reconnus, sont toujours sujets à de vives critiques donc tout est à prendre avec des pincettes, et en plus c'était sans doute un gros facho. Une critique revenant souvent est que les thèses présentées sont très réductrices, et qu'il ne suffit pas de répéter qu'il ne s'agit que d'une introduction à un vaste champ d'études pour expliquer comment des cultures aux histoires si variées soient si facilement assimilées.

Chapitres :

  1. L'espace sacré et la sacralisation du Monde
  2. Le Temps sacré et les mythes
  3. La sacralité de la Nature et la religion cosmique
  4. Existence humaine et vie sanctifiée

Andrzej Sapkowski : Le Sorceleur (livre 1)

Un recueil de nouvelles fantastiques sur les aventures de Geralt de Riv, un sorceleur. C'est ce personnage et ses histoires qui donna lieu à la série de jeux vidéo The Witcher. Le monde est habité par tous les éléments du corpus habituel des mondes de fantasy occidentaux, avec l'ajout de monstres spécifiques à la culture slave, notamment des kikomoras, des bruxæ, etc. Les histoires sont plutôt sympas à suivre, avec plein de rebondissements, les personnages s'étoffent petit à petit et le monde se dévoile (sans trop de surprises). Le style est OK, ma plus grosse critique serait qu'on sent un regard un peu lubrique de l'auteur sur ses personnages féminins, avec des scènes érotiques servant bien peu le récit.

William Faulkner : Le bruit et la fureur

Un récit chaotique d'une famille en totale déliquescence. On suit le monologue interne de quatre personnages différents pendant quatre parties du livre, avec chacun une façon différente de brouiller le récit, par des sauts dans le temps constants, genre tous les paragraphes, ou d'absence de ponctuation, ou en étant tout simplement un personnage inapte à réfléchir normalement.

J'ai eu beaucoup de mal au début et au milieu et à la fin ça allait mieux mais je suis pas sûr de pourquoi je me suis infligé tout ça. Pour l'expérience stylistique de la perte de repères ?

Bernard Friot : Vaincre Macron

Un exposé de ses thèses sur la question des retraites, la principale étant que la gestion des caisses de retraite, amenée en 1946 par Ambroise Croizat et le CNR au sein du projet global de Sécurité Sociale, par les travailleurs eux-mêmes constitue un « déjà-là communiste » sur lequel il faut capitaliser (🤣) pour lutter vers un salaire à vie et ne rien lâcher de ce que nous possédons en sécurité social.

Bon, moi je suis déjà assez conquis à ses propositions, mais j'ai trouvé très dommage qu'il attende la toute fin du livre pour répondre à la question, qui ne manque pourtant jamais de tomber, du financement d'un tel changement de paradigme dans le partage des ressources par l'évidence même que serait l'appropriation des moyens de production. Mais oui c'est vrai, qu'est-ce qu'on attend après tout ? À ce stade on serait pas mieux d'abolir l'argent du coup ? La valeur ? À part ça c'est assez fastidieux à lire, il faut vraiment vouloir en apprendre un rayon sur les nuances entre les différents systèmes de caisses de retraite—ce qui n'est pas mon cas, d'ailleurs j'ai à peu près tout oublié—ce qui ne facilite pas la diffusion des idées de Friot que je juge par ailleurs comme tout à fait pertinentes et révolutionnaires.

Joseph Conrad : Typhon

C'est un capitaine, à mon avis sur le spectre autistique, qui dirige un bateau au sein d'une épique tempête en mer. C'est INCROYABLE ! Et très court, franchement foncez ! Et après allez jouer à Return of the Obra Dinn ! 🌊⛵

David Graeber & David Wengrow : Au commencement était…

Un colossal essai entre Graeber l'anthropologue et Wengrow l'archéologue, impossible à résumer, mais ré-articulant de mille manières la question du commencement dans l'humanité : qui étaient ces ancêtres chasseurs-cueilleurs, quels sont les stades d'évolution d'une société, l'état-nation est-il inexorable, après tout le capitaliste n'est-il pas le parfait aboutiss-OH du calme là ! La réponse est souvent à rebours de nos conceptions, et elle est copieusement argumentée et ponctuées d'anecdotes qui font tenir sur un voyage dans les humanités qui peut vite faire tourner la tête et se sentir perdu. Il n'y avait à peu près pas de tribus primitives de chasseurs-cueilleurs nomades qui se seraient sédentarisés, les sociétés n'ont presque jamais évolué de façon réellement similaire, l'état-nation ne saurait être qu'une parenthèse de l'histoire. Bon ça c'est moi qui projette.

Honnêtement, je me suis totalement senti perdu. Mais ça n'est pas bien important car les thèses avancées sont souvent présentées plusieurs fois, pour leur permettre de se corroborer et d'ancrer ce qui est je pense le plus important pour le lecteur profane, c'est à dire l'idée qu'il n'y a pas, dans l'histoire de l'humanité, un commencement mais une profusion d'histoires dont nous n'avons que rarement idée de la richesse et de la diversité, que voir notre passé à l'aune du Capitalocène n'est souvent pertinent que pour les capitalistes, et en ça c'est un ouvrage passionnant !

John Steinbeck : La perle

Un pêcheur d'une famille très modeste tombe sur un perle incroyable, mais sa quête pour transformer la providence en prospérité pour sa femme et son fils ne sera pas sans embûches. Bon j'ai vraiment pas trop aimé, alors que j'ai adoré Des souris et des hommes, c'est très… simple, creux et lourd à la fois ?


J'ai malheureusement abandonné par manque de temps, bien que c'étaient d'excellentes lectures :

  • Rosemary Sayigh : The Palestinians: From Peasants to Revolutionaries
  • Prosper-Olivier Lissagaray : Histoire de la commune de 1871

#lectures

 
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from Laërte

En introduction du précédent billet, j’évoquais le calme qui a régné sur ce blog durant les derniers mois de l’année passée. Une explication supplémentaire à ce silence peut être donnée ainsi : j’ai joué à Otogi: Myth of Demons.

Rouleau illustré de Tsuchigumo

Simplement dire que j’ai joué à Otogi résume mal la force avec laquelle j’ai été frappé par l’expérience. Mais avant de tenter tant bien que mal d’expliquer ce qu’est ce jeu et d’essayer de vous convaincre de sa grandeur, un peu de contexte semble nécessaire.

Un peu d’histoire

L’histoire de FromSoftware (qu’on abrège volontiers en un fromsoft amical) est hélas bien souvent présentée ainsi : FromSoftware a une réputation bien assise dans le monde du jeu vidéo. Après des années (décennies !) de stagnation et de productions obscures, fromsoft a émergé de l’ombre en 2009.

Depuis Demon's Souls, Hidetaka Miyazaki propose et peaufine à chaque nouvelle sortie une formule de jeu originale et marquante. De jeu en jeu, de nouveaux publics ont été conquis, et cette vision personnelle de ce que peut être un jeu vidéo est devenu une source d’inspiration et d’admiration pour de nombreux joueurs et créateurs.

capture de King's Field IV

Cette vision de FromSoftware est un cliché : il est difficile de ne pas lire ou entendre une variation sur ce thème dès qu’un fan des souls prend la parole. C’est une narration biaisée, et en grande partie fausse.

Ce discours dominant n’est heureusement pas le seul que l’on peut trouver. De nombreuses voix défendent leurs anciennes licences, comme Armored Core ou King's Field.

Mais ce qui est souvent invisible, c’est que FromSoftware était déjà le FromSoftware d’aujourd’hui avant Miyazaki.

L’âge des anciens – de 1994 à 1997

Le site officiel de l’entreprise offre une plongée dans le passé brumeux de FromSoftware. Au fur et à mesure de la descente, des noms de jeux méconnus font leur apparition, accompagnés de repères temporels tels que les sorties de consoles ou les prix reçus.

King's Field III Desktop Calendar

Leurs jeux les plus anciens sont les premiers King's Field. Étranges et prenants, même si austères et difficiles d’accès, je conseille d’au moins en essayer un. On y trouve déjà des éléments qui sont encore aujourd’hui parties intégrantes de la patte fromsoft : un level design tortueux et audacieux, de la dark fantasy désespérée, une immersion dans un monde au premier abord incompréhensible, etc.

On trouve aussi dès le début de leur parcours vidéo-ludique les premiers Armored Core, peut-être historiquement leur licence phare.

Armored Core Postcard

Cette série, je ne la connais que peu : des rapides lectures d’articles, une poignée d’images glanées de-ci de-là, quelques témoignages d’amis m’ayant partagé leurs souvenirs et une heure ou deux passées à essayer un des opus sont loin de suffire pour apprécier les qualités de ces jeux.

Et avec le feu naquit la diversité – de 1997 à 2009

Et ensuite, d’autres choses : Shadow Tower, Echo Night, Spriggan Lunar Verse, Kuri kuri mix… Sur youtube, ThorHighHeels évoque un bon nombre de ces jeux obscurs et révèle leurs charmes imparfaits dans une vidéo : FromSoftware's weird old games. Sa présentation d'Evergrace est assez intrigante, et si je pense me plonger un jour dans le troisième Echo Night c’est en partie lié à cette présentation.

Publicité de FromSoftware, 1997

Il est très difficile de résumer le parcours de fromsoft durant cette période. Cependant, leur capacité à expérimenter, à imaginer des formats narratifs originaux et à créer des identités fortes à leurs jeux est extrêmement perceptible. À noter que certains jeux de cette période sortent parfois de l’ombre : pour exemple, Metal Wolf Chaos (à l’origine une exclusivité japonaise de 2004 sur Xbox) a resurgi en 2019 suite aux efforts de Devolver. Et ce grâce à un tweet.

Un des moyens de se rendre compte de la variété de leur production est de regarder leurs vidéos promotionnelles. Par exemple, l'ending du FromSoftware Premium Disc Evolution 2002.

C’est durant cette longue et foisonnante période, après les premiers King's Field et Armored Core, mais avant la grande ère Miyazaki que sont sortis les deux Otogi.

Panneau publicitaire pour Otogi

C’est alors qu’ils sortirent des Ténèbres – de 2009 à nos jours

Cette ère Miyazaki est arrivée sans heurt ni trompette. L’année 2009 n’a pas marqué les esprits à l’époque. En effet, Demon's Souls a été très bien reçu, mais ce jeu n’est pas instantanément devenu le classique qu’il est aujourd’hui. Et si l’on fait l’effort de ne pas transformer l’histoire, la continuité est évidente.

Demon's Souls is the RPG more westernized version [sic] from the same minds that brought us Otogi.

GreenKnight127 – Forums de GameFAQs

Miyazaki et son équipe ont continué d’itérer sur leur formule : de sortie en sortie, de Demon's Souls en 2009 à Elden Ring en 2022, il est difficile de ne pas remarquer une sorte d’évolution naturelle. Et peu à peu, de petit nom du jeu vidéo, FromSoftware est devenu une référence incontournable.

Je ne peux pas résister à l’envie de partager une des bandes-annonces de 2011 pour Dark Souls premier du nom, dans laquelle L’ADN de petite entreprise proposant des jeux de niche au ton étrange est encore visible.

Ce succès croissant pourrait légitimer le discours expliquant les caractéristiques souvent mises en avant des jeux FromSoftware post-2009 par les choix d’un créateur unique et génial. Et pourtant, il n’y a pas beaucoup à creuser pour savoir ce qu’en disent les personnes les mieux placées pour en parler. En 2015, un senior managing director entré chez FromSoftware en 1997 disait :

Our game development stance hasn't changed in the past 20 years, and in the past, our games used to be treated like shitty games. […] What we believe as far as game development goes has not changed for the past 20 years.

Masanori Takeuchi – Interview pour Game Informer

Et pour preuve, Otogi existe.

Otogi: Myth of Demons

J’avais prévu à l’origine de faire paraître ce billet pour le 12 décembre de l’année dernière, date d’anniversaire (21 ans !) de la sortie du jeu au Japon. Mais j’ai préféré continuer d’y jouer, puis me lancer sur le second. Pour compenser ce retard, je tente de me faire pardonner avec un article plus étoffé.

Visuel promotionnel d'Otogi

Reprenons. En 2002, (2 ans avant le recrutement d’un certain Hidetaka Miyazaki) FromSoftware sort donc Otogi en exclusivité sur la Xbox première du nom. Sous la forme d’un hack-and-slash ou d’un beat-them-all, ce jeu d’action 3D dans une veine similaire à celle d’un Devil May Cry propose un monde intrigant, une narration évocatrice et une atmosphère unique.

FromSoftware, déjà FromSoftware

When the winds had passed, all that remained was a Court in ruins, and a city devoid of all life.

Extrait du prologue d'Otogi

Dans un style éminemment fromsoftwarien : nous y jouons un personnage, Raikoh, ni entièrement vivant, ni vraiment mort, à qui est donné l’ordre de libérer des démons un Japon médiéval ré-imaginé. Nous sommes en terrain connu, d’autant plus que le prologue nous indique que le monde est désormais en ruine après avoir vécu une longue prospérité.

You of the clan who presides over the death of men, awaken Your spirit lies in the realm between Life and Death  You Have brought much death to the world. You are unclean

Faire un parallèle entre l’introduction du premier niveau du jeu et le désormais célèbre “Oh, arise now, ye Tarnished. Ye dead, who yet live.” d'Elden Ring est difficilement évitable.

Pour vous donner une idée de l’atmosphère du jeu, entre chaque niveau est donnée la possibilité de naviguer dans des menus qui permettent entre autres d’entrer dans un shop pour y acheter armes et accessoires. La première fois qu’on y entre, on est accueilli ainsi :

J’ai commencé Otogi suite à un mélange de hasard et de curiosité. Et c’est après la première mission que le charme a opéré, précisément en tombant sur cet écran, puis en enchaînant avec le niveau suivant. Dès lors, j’étais happé par ce kaléidoscope vidéo-ludique.

Le jeu, dès ses premières secondes et jusqu’à sa fin, est construit autour de ce contraste étonnant : d’un côté un gameplay nerveux avec des graphismes spectaculaires (les environnements destructibles sont admirablement gérés par le jeu, et rendent compte en permanence de la violence de l’action) combinés à une difficulté presque sévère, et de l’autre une atmosphère éthérée à la limite de l’expérience méditative, rehaussée par des partis pris visuels et sonores audacieux.

Indeed, for a game that's filled with plenty of over-the-top action, Otogi has something remarkably subtle about it—almost a Zen-like quality, through the juxtaposition of the intense combat and the contemplative, philosophical speeches of the princess and some of Raikoh's enemies. Raikoh himself never says a word.

Greg Kasavin – Critique du jeu sur GameSpot

Les créations de FromSoftware ont souvent cette capacité, au travers de ce qui semble n’être qu’un jeu classique d’un genre éculé (Dark Souls n’est pas grand-chose de plus qu’un Zelda terne, au premier abord) de proposer une immersion introspective dans un univers plus complexe et profond qu’il n’y paraît. Ce n’est absolument pas pour rien que youtube regorge de vidéos de plusieurs heures créées par des gens ayant fini un ou plusieurs de leurs jeux, et souhaitant partager leur expérience personnelle et leur enthousiasme. Ou de vidéos tentant de percer les mystères de ces mondes inoubliables.

Deux exemples parmi tant d’autres : I Beat the Dark Souls Trilogy and All I Made Was This Lousy Video Essay par Noah Caldwell-Gervais et (en français) Dark Souls par Alt236.

Les deux Otogi ont tout pour provoquer les mêmes réactions. Mais ce sont des jeux ignorés, oubliés dans la ludothèque déjà méconnue des anciennes productions de FromSoftware. Je ne peux que remercier du fond du cœur Demon Apologist d’avoir produit une vidéo pour chacun des deux opus de la série, et d’avoir mis en avant certains des points les plus importants de la narration. Vous pouvez y jeter un œil si vous le souhaitez : Sympathy for the Devil | An Otogi: Myth of Demons Essay et Internalized Foxphobia | An Otogi 2: Immortal Warriors Essay. Petit avertissement néanmoins, ces essais dévoilent (spoilent, comme on dit) à peu près tout le contenu narratif des deux jeux. Ce sont peut-être les seules vidéos se penchant sérieusement sur cette licence.

Tant que l’on parle de vidéos, je vous invite à regarder une des bandes-annonces d'Otogi pour la sortie états-unienne. Sa bande son reprend un des thèmes principaux remixé d’une manière bien plus pêchue que tout ce que vous pourrez trouver dans le jeu. Elle est assez difficile à trouver en qualité correcte et je suis donc heureux d’en proposer une copie disponible à tous.

Plus haut, j’évoquais la difficulté du jeu. Elle est réelle, et le deuxième opus en rajoute une couche. C’est une difficulté caractérisée : elle est réfléchie et partie prenante de l’univers.

Par exemple, le personnage que l’on contrôle est en sursis permanent. Raikoh est en effet maintenu en vie uniquement par la volonté de la narratrice mystérieuse qui nous donne les objectifs de jeu. Dans chaque niveau, la réserve de mana du personnage diminue peu à peu ; lorsqu’elle est vide, ce sont les points de vie qui s’amenuisent jusqu’au game over. Alors que le compte à rebours devient critique, en surimpression sonore par-dessus le reste du jeu, les battements du cœur de Raikoh permettent au joueur de s’immerger dans la tension vécue par le personnage.

Dans ce jeu on connaît toujours les raisons de nos échecs, et c’est à chacun d’en tirer des conséquences, et de réussir en jouant différemment. Otogi essaie au maximum de ne pas être injuste, même si les contrôles d’un autre temps peuvent être source de frustration. Un peu comme pour les premiers Souls, d’une certaine façon.

Échec, et mort dans Dark Souls 1

Cette vision d’une difficulté diégétique assez forte (parler d’exigence serait peut-être plus juste) est généralement reconnue comme élément fondamental des jeux signés FromSoftware. Même si, comme à chaque fois, ça n’est pas toujours compris :

In fact, all that is good about this game is surely overshadowed by the immense difficulty, which offers no real positive emotion to the player, only frustration and panic. Arcade-like in appearance, this game is actually designed to lead to pure frustration, because it requires the player not only inhuman timing but also out-of-bounds patience. […] There is no selectable difficulty level, and given the extreme difficulty I would recommend this game only to those who have the possibility to use a well-functioning trainer or cheat system, because all in all the graphics and sound deserve… but from the gameplay point of view this game is not just pure boredom, but pure frustration, pure panic, pure anger.

mulambo – Critique du jeu sur GameFaqs

FromSoftware aime ses univers tiraillés, et cherche souvent à faire prendre conscience au joueur de la complexité des actes individuels ou collectifs dans un tel paradigme. Otogi n’y échappe pas : le Japon imaginaire qui y est présenté est dévasté et sert aussi de terrain pour des guerres plus ou moins ouvertes entre différentes factions aux intérêts contradictoires. Juger de la moralité des volontés de chaque faction (y compris celle que l’on représente) est complexe et parfois sans réponse absolue. Cet aspect est bien moins présent que dans un Armored Core ou dans Elden Ring, mais une sorte d’écologie des puissances est ébauchée.

D’autres éléments encore pourraient être mis sur la table pour démontrer la continuité entre l’avant et l’après Miyazaki. Otogi 2 par exemple, itère sur le premier opus de la même façon que les suites de Dark Souls pour l’original : en enlevant une part de mystère pour la remplacer par plus de finesse, plus de contenu, et plus de difficulté. Je suis conscient que le cas de Dark Souls 2 est discutable, mais les difficultés de développement n’enlèvent rien à la volonté de l’équipe.

Ce qui fait battre mon cœur

Après avoir tenté de montrer la continuité historique des productions de FromSoftware, je peux me pencher sur d’autres aspects qui me semblent particulièrement réussis et originaux.

En dehors même de la jouabilité et de la narration, la présentation du jeu possède un charme et une élégance rares. Des superpositions de motifs mouvants, colorés, et contrastés forment la majorité des menus. Les descriptions des niveaux, des ennemis qui y sont présents, et des objets divers et variés semblent extraits d’œuvres médiévales (ça n’est pas pour rien, j’y reviendrai un peu plus tard) et s’intègrent admirablement dans des arrière-plans d’une esthétique entre new-age acidulé et vaporwave avant l’heure.

Interface des menus, choix de niveau

Le son du jeu est extraordinaire. Le doublage anglais est imparfait : le boss de fin à un côté ridicule, certains effets sonores sont un peu trop mis en avant, etc. J’ose à peine évoquer l’un des premiers niveaux dans lequel nous est hurlé en boucle un “None shall pass!“ insupportable. Mais dans l’ensemble, c’est un travail hors du commun. Et je n’ai jamais entendu une bande son comparable à celle de ce jeu.

Elle est l’œuvre de Yūki Ichiki, qui ira après cela travailler dans une des équipes les plus renommées quant à leur capacité à intégrer musique et jeu dans un ensemble cohérent : Q Entertainment. Et c’est avec lui que sortiront des perles comme Lumines Electronic Symphony ou Child of Eden.

Son arrivée au sein de FromSoftware est assez amusante :

Back then, I had a hardcore gamer friend, and while she was surfing through websites of her favorite game companies, she found that one company was seeking a sound creator to join their sound section. She recorded my music from a cassette tape to MD and sent it out to this company. This company, known as From Software, liked my work, showed interest in the process of my creation, and hired me: A guy who did not even know how to turn off the PC decided to take this challenge and get into the world of sound design.

Yūki Ichiki – Interview pour GameSpot

Plus subjectivement, un autre élément que j’apprécie dans ce jeu est sa concentration. Le jeu ne traîne pas en longueur, tout à un sens et chaque élément contribue réellement à l’ensemble. Et même si certains niveaux sont réutilisés d’une manière qui transpire le manque de moyens, c’est exécuté avec une certaine élégance qui fonctionne assez bien à mon goût. Même le niveau maximal du personnage est bloqué assez rapidement, et un Lvl Max satisfaisant s’affiche alors sur les menus. Il suffit d’une vingtaine d’heures pour finir le jeu, et cette expérience resserrée sur elle-même est rafraîchissante comparée aux nombreux jeux qui tendent à ajouter du contenu optionnel à la pelle.

Enfin, Otogi restera dans ma mémoire comme une porte d’entrée vers un monde qui le dépasse : l'Otogi-zōshi.

Otogi-zōshi

C’est après avoir terminé le jeu et afin de compenser le manque que j’ai cherché à en savoir plus. D’abord en écumant toutes les ressources sur le jeu lui-même. Puis en me renseignant sur ses origines.

L’otogi-zōshi (御伽草子, otogi-zōshi) fait référence à un groupe d’approximativement 350 récits japonais écrits principalement durant l’époque de Muromachi (1392-1573) et du genre littéraire qui en découle. Ces courtes histoires illustrées dont les auteurs restent inconnus forment ensemble l’un des genres littéraires les plus représentatifs du Japon médiéval.

Wikipedia

Yorimitsu et ses hommes combattant le bandit Hakamadare, qui est aidé par un serpent géant

Comme son nom l’indique, Otogi est inspiré par ce corpus. Il s’agit de contes surnaturels qui invoquent monstres, mondes merveilleux, récits religieux, ou encore anecdotes historiques. Leur ton est extrêmement varié, allant de la fresque guerrière à la comédie, en passant par des leçons de morale.

Je parlais de l’interface du jeu, dans laquelle les présentations d’objets et de monstres paraissaient dans un style ancien. Elles ont été en effet réalisées en hommage au style des parchemins historiques de l’otogi-zōshi. À tel point que l'artbook officiel (excessivement rare à mon grand désespoir) en reprend même le format. Comparez-le avec ceci, par exemple.

Le personnage principal du jeu, Raikoh, est une ré-invention d’un personnage présent dans plusieurs de ces contes, lui-même une ré-imagination d’un personnage historique : Minamoto no Yorimitsu. De la même façon, l’antagoniste, le boss de fin est un personnage historique ayant eu une seconde vie sous la forme de mythes et légendes dans l'otogi-zōshi.

Like the original Otogi, we tried to maintain the underlying Japanese flavor—an epic fantasy based on ancient Japanese folklore and mysticism. Rather than reproducing the actual Japanese architecture or style, we decided to design the environments based on what was in our collective imagination. We recognize that this game is fantasy-based, which allows us more creative and visual freedom.

Masanori Takeuchi – interview pour GameSpot

J’aurais pu me contenter de ces bribes éparses, mais au point ou j’en étais, je me devais de creuser plus profondément. Mon premier réflexe a été de chercher une édition plus ou moins complète du corpus en question, comme je pourrais le faire pour la Matière de France ou la Matière de Bretagne. Raté : ces textes sont éparpillés, et peu traduits.

Je me suis rabattu sur deux sources :

Pour la première source, les parutions en question sont dans le domaine public, et on en trouve facilement des scans un peu partout : ici et par exemple. Et tant mieux, car ils coûtent une fortune.

Il est assez amusant de lire les aventures des personnages des deux Otogi dans ces charmants petits livres illustrés. On y retrouve Raikoh, Seimei, Tsuna, Kintarō, etc.

La deuxième source, ce sont d’épais livres bien sérieux. Épais, à tel point que l'édition abrégée de l’anthologie de la littérature traditionnelle japonaise fait tout de même 600 pages.

On y trouve nombre de textes divers et variés, et certains d’entre eux sont des traductions fidèles et sérieuses des plus anciens otogi-zōshi que l’on peut trouver dans des musées. Dans Monsters, Animals, and Other Worlds, on trouve notamment une traduction magnifique du conte Shuten-dōji par Keller Kimbrough. Je ne peux qu’en conseiller la lecture.

J’ai cherché à comprendre à quel point les légendes concernant Raikoh et ses 4 comparses, Seimei ou encore Masakado étaient encore vivantes aujourd’hui. Et surtout, à quel point leur relecture par FromSoftware diverge de leur utilisation moderne. Je n’ai pas de réponse à apporter à mes propres questions, mais ces contes sont toujours présents dans la culture populaire. Pour preuve, le style de théatre Kagura, moins figé que le ou le Kabuki, continue de faire vivre ces scènes mythiques.

C’est là que je me suis perdu : mon sujet n’était plus Otogi, mais le Kagura pour le Kagura. Exposer plus mon parcours à partir de là deviendrait hors-sujet.

Je ne saurais pas dire à quel point le public japonais est familier avec ces contes, mais je suis certain que l’immense majorité des occidentaux n’en a jamais entendu parler. Et pourtant, ils soulignent les choix de FromSoftware d’une manière intéressante.

Dans Otogi, l’ambiguïté de la moralité des actions de chacune des factions que je décrivais plus tôt coïncide étonnement avec les légendes en question. Et je ne serais pas surpris d’apprendre que FromSoftware a spécifiquement choisi ce corpus pour ces raisons.

Raikō and his retainers are the putative heroes, but they behave in some seemingly less-than-heroic ways, complicating readers’ sympathies for Shuten Dōji and the men who defeat him. They may win in the end, but as characters they lack Shuten Dōji’s power and charisma—his ability to capture the medieval imagination—and it is surely no accident that their story, like the older Tale of the Dirt Spider, came to be named after the monster they slay rather than themselves.

Monsters, Animals, and Other Worlds

Conclusion

J’ai principalement parlé du premier Otogi, mais le deuxième m’est tout aussi cher. Simplement, parler du premier est suffisant pour expliquer l’attrait de la licence, et il est difficile de présenter le second sans spoil de l’original. Et puis de toute manière, si vous souhaitez découvrir la série, c’est par celui-là qu’il vous faudra commencer.

Quoi qu’il en soit, la rencontre avec ces deux jeux m’aura marqué. Je suis étonné d’avancer qu’ils sont peut-être devenus mes jeux FromSoftware préférés. Il ne s’agit pas d’une sorte d’hallucination de ma part, je n’ai pas imaginé des qualités qu’ils n’ont pas.

Otogi is a smash hit – pun intended. It might not represent that in the sales charts but does so where it really matters, in the gameplay. It's so dark, atmospheric and plays so smoothly that you'll just get sucked into the ominous world and battle your way back to reality, even when you don't really want to.

Joseph Jackson – Critique du jeu sur Kiziko

Ces deux jeux ont été très bien reçus à leur sortie, comme l’indiquent à la fois les critiques de l’époque, mais aussi les discussions qu’ils ont provoqué. Aucun des deux jeux ne s’est beaucoup vendu, et donc ces traces sont rares. Le forum anglophone The Next Level héberge un sujet ayant tout de même donné suite à plus de 30 pages de discussions, qui montre des retours dans l’ensemble élogieux.

Colin Newton l'exprime admirablement dans son blog Idols and Realities (qui contient d’ailleurs des articles très chouettes concernant Serial Experiments Lain) :

In fact, “Otogi” never seems to get on any lists. Every now and then there’s a retro review that hails it as one of the original Xbox’s most underrated exclusive titles, but even that’s not quite right. Contemporary reviews of the game were positive, and sales were just strong enough to warrant sequel. Nossir, “Otogi” is not underrated. It is a classic in search of a cult.

Colin Newton – Idols and Realities

Et si jamais tout ceci ne vous convainc pas, et que vous préférez un argument d’autorité, sachez donc qu’un certain Hidetaka Miyazaki apprécie le jeu :

Miyazaki also has fond memories of Otogi: Myth of Demons, a fast-and-furious hack-and-slash affair that FromSoftware released in 2002 (2003 in the UK and US), again only for the Xbox.

Hidetaka Miyazaki – Vice

Je vais donc m’arrêter là, et peut-être relancer une partie. Ou regarder plus de théâtre japonais.


Si vous avez survécu à cette longue lecture, vous êtes récompensés par une chose d’aussi exotique qu’amusante. La campagne promotionnelle d'Otogi a été marquée au Japon par une sorte de crossover improbable avec la musique de Britney Spears via son label Jive Records.

Campagne publicitaire Otogi x Britney Spears

Il existe aussi 2 vidéos promotionnelles qui, à défaut de rendre justice à l’ambiance du jeu sont fun. La majeure partie des copies en ligne sont très dégradées. Heureusement, archive.org existe : à voir par ici et par là.

Je crains d’être incapable d’imaginer les raisons qui ont amené cette campagne publicitaire à exister. Et c’est peut-être aussi bien.

#JeuVidéo #lectures

Source des illustrations :

 
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from Laërte

La fin de l’année 2023 sur ce blog a été silencieuse. Parmi toutes les raisons de ce calme, deux surnagent. La première, la plus réelle, est somme toute assez banale : une flemme monumentale. Mais c’est la deuxième qui est à l’origine de ce billet : je me suis vautré allègrement dans l’appréciation de l’imperfection.

Dessin d'un corbeau de 1875

Plongeons donc avec Roger Corman dans le monde d'Edgar Allan Poe. Il ne s’agit pas d’une analyse, ni d’une critique, simplement d’un étalage subjectif de mon goût pour certains films précis, avec des images pour donner envie.

La sincérité : Poe vu par Roger Corman

Corman est un nom bien connu dans le monde du cinéma. Son apport est amplement documenté, et je ne vais pas refaire la liste de tous les acteurs ou réalisateurs qui ont fait leurs premières armes sous son aile. L’éloge de sa filmographie ne m’intéresse pas plus : j’ai beau apprécier une grande partie de ses films (même certains des moins bons), celle-ci est trop longue et variée pour que je m’y penche sur un simple billet comme celui-ci.

Extrait de The Masque of the Red Death

Sa série d’adaptations de nouvelles d’Edgar Allan Poe, parfois appelée Cycle Poe est souvent considérée comme son travail le plus important. Avec légèrement plus de moyens qu’à son habitude, Corman y adapte des textes robustes à l’aide d’une équipe aux pratiques de tournages bien rodées, accompagné d’un Vincent Price extrêmement à l’aise dans les rôles écorchés des personnages centraux des nouvelles choisies. Les qualités de ces films s’en ressentent, et expliquent leur réputation.

Pour autant, ce sont des œuvres imparfaites. Et plus encore lorsque considérées en tant que cycle. Plusieurs films semblent régurgiter la même histoire, les décors sont réutilisés (même si augmentés et peaufinés) à chaque itération, un des films est en fait une adaptation de Lovecraft, et écrire Edgar Allan Poe sans faute sur tous les génériques semble avoir été une tâche trop ardue. Je pourrais longuement continuer cette liste de défauts, mais je ne crois pas qu’il soit nécessaire de prouver l’imperfection.

Extrait du générique de The Haunted Palace, montrant une faute à Allan, écrit Allen

J’apprécie énormément ces adaptations, et leurs faiblesses et erreurs n’enlèvent rien selon moi à leur éclat. Ce qui les démarque d’une majeure partie de la filmographie de Roger Corman et du catalogue de l'AIP est une sincérité dans le propos. Bien sûr, si l’AIP a accepté de produire ces films avec un budget plus conséquent qu’à son habitude, c’est dans l’espoir d’un retour sur investissement. Mais derrière ce pari commercial, tout indique une volonté forte de la part de Roger Corman.

Il explique volontiers pour BFIEvents avoir découvert Poe à l’âge de 12 ou 13 ans et avoir été complètement happé par son univers. Dans la même vidéo, il rappelle qu’à l’époque du tournage Poe restait pour lui une passion.

In 1960, when AIP execs Arkoff and Nicholson asked Corman to make yet another pair of low-budget black and white horror films, he told them he had a better idea, a movie adaptation of Edgar Allan Poe’s The Fall of the House of Usher. Nicholson and Arkoff initially balked at the concept, which differed wildly from their then-staple trade in monster B-pics aimed at drive-in adolescent audiences. “Where’s the monster?” asked Arkoff.

Karina, Horror film history

Au producteur de l’AIP qui s’inquiétait au sujet d’une adaptation de La Chute de la maison Usher et demandait où se situait le monstre dans cette histoire, Corman répondit « Sam, la maison est le monstre. » ; un propos sincère, une volonté dépassant l’aspect mercantile.

Renversement du fantastique

Cette vision ne se retrouve pas uniquement dans House of Usher, le premier film du cycle. Une majeure partie de la série se détache ainsi de la vision du cinéma horrifique de l’époque : l’horreur ne se situe plus dans un élément terrible faisant intrusion dans une réalité normale, mais dans un écosystème. Le malaise ou la peur naissent de l’immersion progressive dans un environnement : un lieu et son histoire, ses habitants et leurs passés. Exactement à l’inverse du schéma monstre/normalité, c’est un élément exogène normal qui fait irruption dans la réalité monstrueuse.

On est au final assez proche de l’imaginaire du vampire au cinéma, dans lequel l’innocent naïf découvre peu à peu la réalité fantastique du vampire et de son univers, mais le vampire est absent : un lieu joue son rôle.

Corman ne cherche pas à brouiller les pistes. Le début de chaque film intègre une séquence caractéristique qui permet de s’identifier à l’élément extérieur, un personnage normal. On le voit se rapprocher d’un lieu, puis d’une porte, véritable entrée dans l'écosystème fantastique. Ce plan de l’innocent face à la porte en devient presque caricatural. Seul The Raven y échappe, en ne présentant que quelques plans de contexte. Cela s’explique aisément par sa spécificité : ce film n’est pas une plongée dans l’étrangeté, mais une comédie. Il n’est pas surprenant d’y voir donc des différences de ce type.

Extrait de House of usher, personnage face à une porte Extrait de The pit and the pendulum, personnage face à une porte Extrait de premature burial, personnage face à une porte Extrait de Tales of terror, personnage face à une porte Extrait de The Raven, plan de contexte sur un château isolé Extrait de Haunted palace, personnage face à une porte Extrait de Masque de la mort rouge, calèche entrant dans le porche d'un château Extrait de Tombe de Ligeia, personnage face à une porte

Les deux films les plus récents, The Masque of the Red Death et The Tomb of Ligeia brisent légèrement la présentation1. Ce renouvellement est bienvenu : personne ne veut voir 8 films identiques de suite.

House of Usher plonge entièrement dans cette thématique, et l’assume jusqu’au bout. Alors même que la maison se craquelle de toute part, le personnage extérieur tient une conversation avec un des occupants de la demeure :

Philip Winthrop : “How long has that been going on?” Bristol : “So long I’m hardly aware of it anymore. It’s just the settling of the house.” Philip Winthrop : “That settling could cause this entire structure to collapse. That doesn’t worry you?” Bristol : “Oh no, sir. If the house dies, I shall die with it.”

Le bâtiment même est vivant, respire, évolue et finira par mourir.

Thème et variations – onirisme fantastique

Ce cycle est répétitif (ce n’est pas un défaut, tout juste une caractéristique) : les thématiques, acteurs et décors s’y retrouvent quasiment sans exception dans les 8 films. Vincent Price y tient un rôle principal dans tous sauf un, The Premature Burial. La photographie et les décors sont homogènes, sauf pour The Tomb of Ligeia. Les séquences oniriques tiennent une place importante dans presque chacun des film, Corman vernissant l’œuvre de Poe d’une dimension psychanalytique.

Corman exhibe une ambition artistique plus évidente que dans ses autres films, et il entend moderniser le cinéma gothique en l’éclairant de sa propre lecture psychanalytique, sommaire mais cohérente.

Olivier Père – blog ARTE

La fascination de Corman pour l’expressionnisme est presque palpable, beaucoup a été dit sur le sujet. Il est fort probable que je ne fasse que paraphraser le monde entier si je radote sur l’utilisation des escaliers omniprésents et des couloirs tortueux.

Extrait The pit and the Pendulum, 2 personnages descendant un escalier

Ce que je souhaite pointer du doigt, ce sont les séquences oniriques évoquées plus haut, extrêmement parlantes non par leur interprétation symbolique, mais par leur simple force cinématographique : une sorte d’enfant terrible d’un expressionnisme allemand ré-imaginé, greffé sur une vision originale de ce qu’auraient pu être les films de la Hammer.

Extrait de séquence onirique des adaptations de Poe par Corman Extrait de séquence onirique des adaptations de Poe par Corman

Des effets spéciaux assez simples : filtres colorés, objectifs déformants, fumées, jeux d’éclairage et de fondus. Une technique éprouvée : jeu théatral et exagéré, plans muets ayant pour seule bande son une musique orchestrale tendue.

Ces techniques cinématographiques ne sortent pas de nulle part, et si on est particulièrement amené à penser au cinéma des années 20 durant ces scènes, ça n’est pas pour rien2 : Pawel Aleksandowicz rappelle que Corman a étudié l’expressionisme allemand avant le tournage de cette série de films.

These similarities to expressionism are no coincidence – prior to shooting the Poe series, Corman studied the works of German expressionists.

Pawel Aleksandrowicz – The Cinematography of Roger Corman

Extrait de séquence onirique des adaptations de Poe par Corman Extrait de séquence onirique des adaptations de Poe par Corman

Vincent Price, une incarnation parfaite

Vincent Price a eu une longue et dense carrière. Il savait cuisiner du poisson au lave-vaisselle3, était un acteur hors du commun, a inspiré Tim Burton, a participé à la meilleure partie de Thriller de Michael Jackson, et a été l’incarnation parfaite de l’univers de Poe. Non seulement en prenant les rôles de plusieurs personnages de ses nouvelles, mais aussi en enregistrant des lectures de ses textes.

Vicent price de profil dans Evening with Edgar Allan Poe

Regarder, écouter An Evening with Edgar Allan Poe, c’est découvrir la capacité de Vincent Price à faire prendre corps à ces nouvelles. On en trouve facilement des critiques élogieuses, et ça n’est pas pour rien :

Price seamlessly creates an entire world in each 15-20 minute segment, commanding the screen and crafting subtle gradations of character evolution through every turn of phrase and each layered glance.

Paul Farrell – bloody-disgusting.com

Il y a bien entendu une pelletée d’acteurs de grande carrure dans ces films : Hazel Court, Boris Karloff, Peter Lorre, et même un jeune Jack Nicholson. Mais Price est présent dans 7 films sur 8, et son jeu transperce et transcende l’entièreté du cycle.

Vincent Price dans House of Usher

Un acteur investi, personnifiant à merveille les personnages de Poe sous la direction d’un Corman passionné et convaincu, cette rencontre est l’essence de la réussite de ces films. Imaginer The Masque of the Red Death sans Price est une tâche ardue. Le réalisateur semble aussi de cette idée :

« Jamais, pour rien au monde, je n’aurais imaginé qu’après plus d’un demi-siècle, les gens parleraient encore de ces films. J’en suis très honoré, mais je sais qu’une bonne part de cette postérité est due au travail de Vincent Price. »

Roger Corman – Télérama

Et bien d’autres choses

Je pourrais aussi évoquer les musiques de ces films, particulièrement celles composées par Ronald Stein. Si vous le pouvez, écoutez celles de The Haunted Palace et The Premature Burial. La manière dont Poe est détourné en comédie pourrait faire l’objet d’un article complet. Les génériques mériteraient aussi qu’on se penche sur eux.

Extrait du générique de fin de The Masque of the Red Death Extrait du générique de The pit and the Pendulum Extrait du générique de début de House of Usher

Plutôt que de lire mon enthousiasme concernant tous les détails de ces films, il vous sera plus agréable les regarder. D’autant plus qu’ils sont désormais disponibles en très bonne qualité (certains ont même profité d’une magnifique restauration, The Masque of the Red Death est superbe !). Nul besoin de se les infliger les uns à la suite des autres ; n’ayant aucun lien narratif entre eux, les regarder en cherchant à suivre une chronologie n’est pas nécessaire non plus. Néanmoins, je conseillerai tout de même un ordre un peu particulier :

  • House of Usher – premier film de la série, assez pur dans son propos et sa présentation.
  • The Masque of the Red Death – avant-dernier film, certainement un des meilleurs, afin de voir à quel point ce cycle peut pousser le concept dans ses retranchements.
  • The Pit and the Pendulum – le deuxième à être sorti, très proche du premier. Il est préférable de ne pas voir les deux de suite afin de ne pas se lasser précocement.
  • Tales of Terror – une sorte d’anthologie de 3 histoires, la deuxième possède un ton résolument humoristique et le changement général de rythme est bienvenu.
  • The Premature Burial – troisième film du cycle, relativement similaire aux deux premiers, peut-être un peu moins bon.
  • The Raven – une pure comédie, avec des acteurs brillants. Ceux qui ont aimé la deuxième partie de Tales of Terror ont des chances d’apprécier.
  • The Haunted Palace – retour au sérieux, avec cette fois-ci une adaptation de Lovecraft, pourquoi pas après tout ?
  • The Tomb of Ligeia – enfin, le dernier, l’adaptation la plus fidèle au texte d’origine, filmé en extérieur avec une photographie plus classique : un très bon film pour clore le cycle, différent dans sa présentation mais bourré de qualités. Peut-être mon préféré ?

Et puis bien sûr, il y a les textes d’origine. Les éditions Phébus ont sorti une nouvelle traduction de l’ensemble des nouvelles de Poe. J’ai entamé le premier tome, et je ne peux qu’en conseiller la lecture (qui n’enlève rien à la qualité des traductions historiques par Baudelaire).

Dessin de travail d'une tête de corbeau pour une édition de The Raven de 1875

#cinéma

Source des illustrations :


1 Dans The Masque of the Red Death, le jeu entre intérieur et extérieur est amplifié à l’extrême : le personnage exogène est intégré de force dans l’intérieur fantastique, mais l’extérieur normal est aussi la source d’une part d’irréel. Certains personnages cherchent à rentrer mais ne le peuvent, d’autres à sortir, etc. Dans The Tomb of Ligeia, la frontière est plus grande, plus floue. L'écosystème est un territoire, et non une demeure fermée ; la porte ayant une portée moindre, ce qui est mis en avant est plutôt l’intrusion dans le domaine. D’une certaine manière, les prémices de cette variété d’utilisation du concept sont déjà présentes dans The Haunted Palace. La demeure fantastique transpire son irréalité sur le village voisin, et celui-ci en retour est moteur de changement dans la demeure.

2 Si cette période du cinéma ne vous évoque rien, je ne peux que vous conseiller des films tels que Le Golem, Le Cabinet du docteur Caligari, ou encore Nosferatu le vampire. Ces trois films appartiennent au domaine public, et sont facilement trouvables.

3 Vincent Price était réellement un très bon cuisinier, et a publié plusieurs livres de cuisine, dont certains écrits à 4 mains avec sa femme Mary.

 
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from Laërte

Tenir un blog sans établir préalablement un thème structurant son contenu est un exercice ambigu : on peut laisser libre cours à ses envies d’écriture, mais des frontières sont à établir tout de même. Tout ne se partage pas, ou du moins tout ne se partage pas sans passer par un filtre. Avec le temps, le filtre peut s’affiner ; il n’est pas si rare de lire un blog à rebours, et de parcourir à l’envers la route qui a mené d’un contenu fourre-tout à une thématique précise.

arbre perdant ses feuilles

Je suis loin d’en être là, le contenu que je propose ici est encore en cours de définition. Et en attendant que j’aborde certains sujets, ce billet est pour moi une manière de partager quelques unes de mes lectures qui sont pour le moment au même point que ce blog : ébauchées ou fragmentées.

Je ne finis pas toujours les livres que je commence ou ré-aborde. Je ne tire aucune fierté du fait de finir tel ouvrage qui m’est difficile à lire, et je ne me lance pas de défis de lecture. Je lis ce que je souhaite quand je le désire. J’ai parfois goût à me plonger dans ce que je n’aime pas, par curiosité, pour me laisser la possibilité de changer d’avis, ou simplement pour mieux comprendre mon ressenti négatif face à une œuvre ou un auteur, mais en aucun cas je me force.

Rien n’indique que je vais achever la lecture des ouvrages listés plus bas, mais une lecture parcellaire a sa propre valeur, et c’est elle que je veux évoquer, ainsi que son contexte ; à quoi sert un blog si on ne parle pas égoïstement de soi ?

book cover

Célubée — Isabelle Hausser

Un ami fit il y a peu un passage par chez nous, c’était la fin de l’été, au cœur de la saison des vides-greniers et des braderies. Et justement se tenait en ce jour celle de la ville ou je réside.

Nous en avons fait un tour, et j’en ai profité pour acquérir quelques livres à bas coût. L’ami en question, alors que nous nous apprêtions à rentrer fit une lecture rapide de la quatrième de couverture d’un livre qui avait attiré son regard et me dit quelque chose du type « j’ai rien compris ». À sa décharge, il était épuisé. Intrigué, je ramenai la chose. C’était Célubée.

Nous étions maudits, plus encore que je ne le supposais. Ce qui était arrivé aujourd’hui, en pleine lumière, avait dû se produire à maintes reprises déjà, sans que personne s’en aperçoive.

Il s’agit d’une forme de fantasy calme, sans elfes ni mages ; un monde imaginaire servant à la fois de matière brute et de prétexte romanesque. Certaines choses me parlent, on y trouve un récit dans le récit, construit et narré de l’intérieur par les protagonistes. C’est un procédé souvent mal utilisé, mais ici, une certaine finesse est déployée dans l’entremêlement des narrations.

cité légendaire

Alors que je cuisinais tout à l’heure, j’ai tout juste entamé le deuxième tiers de ce roman plutôt imposant. Je l’apprécie pour l’instant, son rythme lent et maîtrisé y est pour quelque chose. Il est tout à fait possible néanmoins que l’ennui prenne le pas sur l’envie de découverte. Quoi qu’il en soit, je n’avais jamais entendu parler ni de ce livre, ni d’Isabelle Hausser en général, et il est plutôt rare qu’un roman de fantasy ne me tombe pas des mains en moins d’une heure. Il me semble donc important d’en partager ici l’existence. Et il est probable que je m’intéresse aux autres écrits de l’autrice s’il y en a.

L’Éthique — Baruch Spinoza

Quiconque a lu l’Éthique se souvient au moins autant de l’acte de déchiffrage de ce texte que de son contenu. Et je refuse de croire que quelqu’un puisse avancer qu’il s’agit d’un écrit facilement abordable et qui se lit naturellement.

I. J’entends par cause de soi ce dont l’essence enveloppe l’existence ; autrement dit, ce dont la nature ne peut être conçue sinon comme existante.

Ce livre est un monument, non par sa taille, mais par son propos et sa forme hors du commun. Spinoza s’est évertué a raisonner comme on le ferait pour une démonstration géométrique : tout tourne autour de définitions, propositions, démonstrations, axiomes, etc.

II. Cette chose est dite finie en son genre, qui peut être limitée par une autre de même nature. Par exemple un corps est dit fini, parce que nous en concevons toujours un autre plus grand. De même une pensée est limitée par une autre pensée. Mais un corps n’est pas limité par une pensée, ni une pensée par un corps.

J’ai lu il y a longtemps ce texte, et il m’a laissé un souvenir durable. Trouvé pour moins d’un euro à la braderie évoquée plus haut, je me suis laissé tenter. Et le lendemain matin, levés bien tôt pour accueillir des artisans qui devaient intervenir dans notre logement, en compagnie de l’ami épuisé qui fut la cause de l’acquisition de Célubée, la lecture put avoir lieu.

III. J’entends par substance ce qui est en soi et est conçu par soi : c’est-à-dire ce dont le concept n’a pas besoin du concept d’une autre chose, duquel il doive être formé.

J’ai donc, je ne sais plus exactement pour quelle raison, commencé de lire l’Éthique à voix haute. Après réflexion, c’est certainement une des pires choses à infliger à une personne sortant d’un festival, à peine reposée par une nuit courte interrompue par l’arrivée de menuisiers et de peintres.

géométrie

Quoi qu’il en soit, l’anecdote est amusante, et même si je ne pense pas continuer cette relecture tout de suite, l'Éthique reste un livre magnifique quoi qu’imparfait. Et je peux qu’en conseiller la lecture à ceux qui seraient intrigués par sa forme ou son sujet.

Jane Eyre — Charlotte Brontë

Voici une chose bien connue, dont seul le nom m’était familier. C’est la seule des sœurs Brontë dont je n’avais rien lu jusqu’à présent, malgré la grande réputation de ses romans.

Jusqu’ici j’ai raconté avec détail les événements de mon existence peu variée ; pour les premiers jours de ma vie il m’a fallu presque autant de chapitres que d’années ; mais je n’ai pas l’intention de faire une biographie exacte, et je ne me suis engagée à interroger ma mémoire que sur les points où ses réponses peuvent être intéressantes ; je passerai donc huit années sous silence ; quelques lignes seulement seront nécessaires pour comprendre ce qui va avoir lieu.

Premier constat : l’écriture est austère, même si élégante. La traduction que j’ai sous la main y est pour quelque chose je crois. Elle est très certainement datée, peut-être peu fidèle, mais sa langue surannée crée une patine qui ajoute une allure convenant agréablement à l’atmosphère dure et étouffée d’un XIXᵉ siècle anglais qui ne cache pas ses tourments.

victorian woman

Loin de moi la prétention de vouloir exprimer ce qu’est Jane Eyre. Tout au plus, je peux en faire un résumé ingrat : c’est une sorte de roman anglais, qui sous une forme pseudo-autobiographique propose un récit dont le sous-texte féministe est à la fois affûté et salvateur dans un siècle de littérature dominé injustement par des grands hommes de lettres.

Ma lecture est pour le moment en pause. Mais je ne vois pas ce qui empêcherait non seulement je la termine, mais aussi que je jette un œil à la version originale. Ce roman fait indéniablement partie de ceux dont l’image qu’on peut avoir d'eux a priori correspond à la réalité. Mais comme souvent dans ce genre de situation, la réalité du texte est bien plus belle que l’imaginaire qu’on peut en avoir.

#lectures

Source des illustrations :

 
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